Sommeil et maladie d’Alzheimer : quel lien ?

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Date de rédaction :
04 juin 2020

Une mauvaise qualité du sommeil (mesurée par l’index de Pittsburgh PSQI) peut contribuer au déclin cognitif subjectif. Une étude coréenne de l’équipe de So Lee, du département de médecine préventive et santé publique de l’Université d’Ajou, portant sur 203 082 personnes âgées de 19 ans et plus, vivant à domicile, montre que 17,7 % présentent un déficit cognitif subjectif et 2,2 % une limitation fonctionnelle associée à ce déficit cognitif. Les personnes ayant une mauvaise qualité de sommeil (score PQSI >5) ont un risque de déclin cognitif et de limitation fonctionnelle doublés.

Une autre étude coréenne, menée par Young Min Choe et ses collègues, du département de neuropsychiatrie de l’hôpital universitaire national de Séoul, dans une étude portant sur 202 personnes âgées sans troubles cognitifs à l’inclusion (Korean Brain Aging Study for the Early Diagnosis and Prediction of Alzheimer’s Disease), montre qu’une mauvaise qualité de sommeil au milieu de la vie (40-50 ans) est associée significativement à une accumulation de protéine amyloïde dans le cerveau, alors qu’une courte durée de sommeil au milieu de la vie est associée significativement à une réduction accélérée du métabolisme dans certaines zones cérébrales impliquées dans la cognition.

Deux études américaines suggèrent que l’augmentation du nombre de siestes pourrait être un signe avant-coureur de la maladie. L’équipe de Kristine Yaffe, du département de psychiatrie, neurologie et épidémiologie de l’Université de Californie à San Francisco (États-Unis), a équipé d’actigraphes de poignet (bracelets mesurant le mouvement lors d’activités de la personne), et les a suivis pendant 12 ans. Les hommes faisant la sieste dans la journée plus de 120 minutes par jour ont un risque de déclin cognitif 1,66 fois plus élevé que des hommes faisant la sieste moins de 30 minutes par jour. La qualité du sommeil nocturne n’a pas d’influence significative sur ces résultats (Leng Y et al).

Dans des coupes cérébrales post-mortem, l’équipe de Léa Grinberg, du centre Mémoire et vieillissement de la même université, montre que la protéine tau s’accumule dès les premiers stades de la maladie d’Alzheimer dans trois zones du cerveau qui maintiennent l’éveil dans la journée. « Ce n’est pas seulement un noyau cérébral qui se détériore, mais tous le réseau neuronal contribuant à l’éveil. Le cerveau n’a aucun moyen de compenser, car toutes ces cellules fonctionnellement liées sont détruites en même temps », expliquent les chercheurs. « Il semble que le réseau qui favorise l’éveil soit particulièrement vulnérable à la maladie d’Alzheimer. »

Lee JE et al. Effect of poor sleep quality on subjective cognitive decline (SCD) or SCD-related functional difficulties: Results from 220,000 nationwide general populations without dementia. J Affect Disord 2019; 260: 32-37. 28 août 2019. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31493636. Choe YM et al. Sleep experiences during different lifetime periods and in vivo Alzheimer pathologies. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6739958/pdf/13195_2019_Article_536.pdf (texte intégral). Leng Y et al. Objective napping, cognitive decline, and risk of cognitive impairment in older men. Alzheimers Dement 2019; 15(8): 1039-1047. Août 2019. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31227429. Oh J et al. Profound degeneration of wake-promoting neurons in Alzheimer’s disease. Alzheimers Dement, 8 août 2019. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31416793.