Représentations de la maladie juillet 2008

Société inclusive

Date de rédaction :
01 juillet 2008

Presse

Des souris et des hommes : décrypter l’information scientifique
Jean Georges, directeur exécutif de l’association Alzheimer Europe, apporte un regard critique sur les représentations des résultats de la recherche présentés dans les journaux, qui tendent à exagérer la portée des découvertes médicales. Le lecteur doit savoir dépasser le titre des articles, prévu pour attirer l’attention : une simple interrogation du moteur de recherche Google pour les mots-clés « Alzheimer’s » et « hope » (espoir) donne près de cinq cent mille résultats ; « Alzheimer’s » et « breakthrough » (percée, avancée importante) en donne plus d’un million. Sommes-nous pour autant proches d’un traitement ? Les journalistes ont un désir réel de communiquer de bonnes nouvelles, mais rapportent trop souvent, en les embellissant ou en les résumant, des travaux menés chez l’animal ou chez l’homme à un stade encore préliminaire. Lire des nouvelles scientifiques demande une réelle compréhension de l’organisation de la recherche et du processus de développement de nouvelles molécules. Tout lecteur doit au moins connaître les quatre phases de développement pour replacer l’information dans son contexte, afin d’avoir une idée des échelles de temps en jeu. Du développement préclinique chez l’animal à la phase III (essais cliniques à grande échelle chez l’homme), puis à l’enregistrement d’un nouveau médicament permettant sa prescription, il peut s’écouler dix à treize ans. De plus, à peine un candidat-médicament sur dix mille sera in fine accessible aux patients. Les média demeurent essentiels pour simplifier et rendre tangible et compréhensible l’information scientifique auprès du grand public, mais des précautions stylistiques et méthodologiques s’imposent pour éviter de monter en épingle des histoires au mieux prématurées et, au pire, génératrices de faux espoirs chez les personnes malades et leurs aidants.

Dementia in Europe, juin 2008.

Internet

La maladie d’Alzheimer expliquée aux enfants et aux adolescents
L’Association Alzheimer des Etats-Unis propose, sur son site, plusieurs documents et liens Internet pour expliquer aux enfants et aux adolescents la maladie d’Alzheimer et le fonctionnement du cerveau, notamment une liste de cent une activités pour passer du temps avec une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, ainsi que des histoires pour les enfants de maternelle et de primaire. La Fondation Nemours propose une section sur la maladie d’Alzheimer sur un site dédié à la santé des enfants. L’Université du Wisconsin à Madison, l’Université de Harvard et l’Université de Washington à Seattle proposent une introduction à la neuroimagerie et aux neurosciences.
La station Internet YouTube et le centre mémoire de l’Université de Californie à San Francisco (Etats-Unis) ont lancé une chaîne vidéo dédiée à l’amélioration des connaissances des maladies neurodégénératives incurables. Cette collaboration a été inspirée par l’initiative « Fight for Mike », lancée par plusieurs industriels et financiers de la Silicon Valley, pour venir en aide à Mike Homer, pionnier du marketing d’Apple et de Netscape, qui souffre de la maladie de Creutzfeld-Jacob et est soigné à l’Université de Californie à San Francisco.

www.alz.org, 19 juin 2008. www.whyfiles.org, www.kidshealth.org, Neuroscience for kids :faculty.washington.edu, 19 juin 2008. www.prweb.com, 17 juillet 2008.

Cinéma

La Ballade de Narayama,de Shohei Imamura (1983)et Keisuke Kinoshita (1958)
« Les personnes âgées sont les trésors de chacun », dit un haiku japonais. Mais il y a aussi, au Pays du soleil levant, la glaçante légende d’Ubasute Yama, « la montagne des vieillards abandonnés », également appelée la Ballade de Narayama, qui date de la famine de l’époque d’Edo, vers 1836 (textes originaux: nouvelles Tohoku no Zummutachi et Étude à propos des chansons de Narayama, de Shichiro- Fukazawa). Pour survivre aux temps difficiles, certains villages pauvres de l’archipel abandonnaient leurs vieux sur la montagne pour y attendre la mort. Pour Alcyone Wemaëre, du Mensuel des maisons de retraite, la vision du grand âge telle qu’elle ressort de l’imaginaire japonais est ambivalente. Il n’ya pas de journée de solidarité, mais un « jour de respect envers les anciens » (keiro no hi). L’âge cible a longtemps été fixé à soixante ans, durée d’un cycle complet du zodiaque japonais, mais en raison du vieillissement de la population, il a été repoussé à soixante-dix ans. Dans les années 1980, le vieillissement de la population se doublait d’une réalité sociale inédite au Japon : à contre-courant des traditions, de plus en plus de familles renonçaient à assumer la prise en charge de leur parent à domicile. Exigüité des logements, mode de vie plus individualiste, personnes âgées trop dépendantes : impossible, désormais, de s’en remettre exclusivement à l’initiative privée et à la bonne volonté des proches. En 1989, a été lancé le premier des « plans or », censé « donner corps à une société fondée sur le vieillissement ».

Le Mensuel des maisons de retraite, juin-juillet 2008.

www.cof.ens.fr/cineclub/synopsis, french.imdb.com.

Télévision

Adieu d’amour
Le réalisateur de documentaires Paul Watson a obtenu le prix de l’Académie britannique du film et de la télévision (BAFTA). Parmi ses trois cents documentaires, il a réalisé en 2007 un film de quatre-vingt-dix minutes intitulé « Malcolm and Barbara : love’s farewell » (Malcolm et Barbara : adieu d’amour), une étude du voyage de Malcolm à travers la maladie et ses effets sur ses proches.

Dementia in Europe, juin 2008.

Expositions

Hommage
Le Centre Pompidou, pour son trentième anniversaire, rend hommage à Claude Pompidou, qui avait créé une Fondation pour venir en aide aux personnes handicapées et atteintes de la maladie d’Alzheimer. Une quinzaine d’œuvres de sa collection personnelle sont présentées : Max Ernst, František Kupka, Robert Delaunay, Martial Raysse, Raymond Hains, Jean Tinguely, Niki de Saint-Phalle, Pierre Paulin.

www.lefigaro.fr, 26 juin 2008.

Les trois vies de ma mère, de Gérard Alary
Gérard Alary est peintre. Sa mère, Georgette, née en 1914, souffre depuis dix ans de la maladie d’Alzheimer et vit avec lui, souvent dans son atelier près de Paris. « Comme je ne suis pas un peintre réaliste, j’ai élaboré de grandes toiles, avec cette idée qu’il y avait là ma mère, et que moi, je la portais », déclare-t-il. Il les a accrochées dans la chapelle de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris. Pour Eric Favereau, de Libération, « les tableaux sont longs, comme des agonies. Peu à peu se décomposent les traces de pas, les mots, les liens avec les autres, le souvenir aussi ». Pourquoi une exposition ? Gérard Alary confie : « ma mère est vivante, elle est là, au milieu de nous. C’est un personnage extraordinaire. Ce que j’aime, dans cette histoire, c’est que grâce à ce travail, elle se retrouve propulsée dans l’espace public. Et qu’elle, personne absente, peut devenir un sujet de création. Il y a toujours un contact avec elle, un lien ».

www.liberation.fr, 26 juin 2008. Pitié-Salpêtrière, jusqu’au 24 août.

Littérature

La démence : une histoire ancienne
Depuis l’Antiquité, les termes désignant ce que nous appelons la folie correspondent, d’une part, à la perte de l’esprit, de l’intelligence, et d’autre part, à des comportements extravagants, c’est-à-dire hors des normes sociales usuelles. Le terme français démence n’apparaît qu’au quatorzième siècle et son emploi demeure rare avant le dix-neuvième. On lui préfère le terme de folie, apparu dès le onzième siècle, d’après l’adjectif fol, du latin follis (sac, ballon). Les divagations du fol sont ainsi comparées à la dérive d’un ballon sous l’influence des vents. Le mot démence est emprunté au latin dementia, perte de l’esprit, de l’intelligence (mens), et a été utilisé pour la première fois par Cicéron (106-43 avant JC) dans les Catilinaires. La double acception des termes désignant la folie existait déjà en grec, avec, d’un côté, les mots se référant à la perte de la raison (anoia, paranoia, aponoia) et, de l’autre, ceux qui désignaient des comportements aberrants comme mania, dérivé de Manès, personnage d’une comédie d’Aristophane et qui a donné l’adjectif maniakos (insensé, exalté).

Psychol Neuropsychiatr Vieil. Derouesné C. La maladie d’Alzheimer : regards sur le présent à la lumière du passé. Une approche historique. Juin 2008.

La Vieillesse,de Simone de Beauvoir
A l’occasion du centième anniversaire de la naissance de Simone de Beauvoir, Gérontologie vision nouvelle rend hommage à l’auteur de La vieillesse, publié en 1970, « un essai volumineux aux approches multiples (ethnologique, historique, sociologique…), qui reste l’une des grands références dans l’histoire de la gérontologie ». « Cessons de tricher : le sens de notre vie est en question dans l’avenir qui nous attend ; nous ne savons pas qui nous sommes, si nous ignorons qui nous serons : ce vieil homme, cette vieille femme, reconnaissons-nous en eux. Il le faut si nous voulons assumer dans sa totalité notre condition humaine. Du coup, nous n’accepterons plus avec indifférence le malheur du dernier âge, nous nous sentirons concernés : nous le sommes », écrivait-elle.

Gérontologie vision nouvelle, 15 juillet 2008. Simone de Beauvoir, La Vieillesse, Editions Gallimard, 1970.