Reconnaissance sociale et rémunération des aidants

Droit des personnes malades

Date de rédaction :
01 mai 2007

Denis Piveteau, directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, estime qu’il faudra mobiliser de 2 à 7 milliards à l’horizon 2030 pour les aides humaines et techniques pour les personnes (www.agevillagepro.com, 23 mai; La Croix, 14 mai). L’aide humaine est prépondérante dans l’accompagnement de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées, et la reconnaissance sociale du rôle des aidants de personnes âgées dépendantes s’amplifie.

Si la plupart des politiques publiques utilisent des réductions d’impôt ou des droits à congé en contrepartie financière de la charge des aidants, l’Espagne innove en considérant cette charge comme un travail et en reconnaissant les aidants familiaux comme des salariés. Jesús Caldera, ministre du Travail et des Affaires sociales, a annoncé que les aidants familiaux d’une personne dépendante recevront un salaire pouvant atteindre 487 �, plus 74 � de couverture sociale ouvrant des droits pour la retraite. Le montant individuel dépendra du niveau de dépendance. Le président de l’association de familles CEAFA a demandé au gouvernement que les revenus de retraite ne soient pas pris en compte dans le calcul, afin de ne pas léser les classes moyennes (Family Caregiver Alliance, 23 mai, Radio-espai-vital, 24 avril).

Aux Etats-Unis, le Sénat examine un projet de loi sur les moyens de financer douze semaines de congés payés (170 $ par semaine) dont les employés d’Etat pourraient bénéficier pour s’occuper d’un parent malade (Family Caregiver Alliance, 23 mai). Les entreprises américaines, quant à elles, proposent à leurs employés de nouveaux avantages sociaux, sous forme de services, pour les aider à mettre en place la prise en charge d’un parent dépendant (Buffalo News, 15 mai).

En France, le décret créant le congé de soutien familial est « une avancée majeure », souligne le Collectif interassociatif d’aide aux aidants familiaux (CIAAF), qui déplore, en même temps, « des modalités trop restrictives » : exigence d’une ancienneté de plus de deux ans dans l’entreprise, taux d’incapacité de plus de 80% ou classé en GIR 1 ou 2, absence de rémunération, limitation à « quelques mois » (Actualités sociales hebdomadaires, 11 mai).

Un nouveau programme de recherche de la MiRE/DREES étudie la condition des femmes aidantes principales d’un parent âgé, en regard des politiques sociales en direction des personnes âgées dépendantes. En plus d’un emploi et de la gestion de leur ménage, ces femmes, âgées de cinquante à soixante-cinq ans, assument tout ou partie de l’assistance à un proche âgé ou dépendant. Le projet vise à comparer la situation dans sept pays européens relevant de différents régimes d’Etat Providence (La Lettre de la MiRE, 11 mai). Etudiant les conséquences de la réforme sur la dépendance aux Pays-Bas, Marie Wierink de l’IRES craint un retour de la femme au foyer, qui pénaliserait l’emploi des femmes (Chronique internationale de l’IRES n°105).

Jusqu’où ira la politique du nouveau gouvernement concernant la reconnaissance financière des aidants familiaux des personnes âgées dépendantes ? Cette question ne peut être éludée par Nicolas Sarkozy, élu par deux-tiers des seniors et qui a senti les enjeux de la nouvelle donne démographique. Le programme du candidat propose notamment la création d’un congé de solidarité familiale rémunéré permettant à un proche de se consacrer quelque temps à l’accompagnement d’une personne en fin de vie (www.senioractu.com, 21 mai).

En effet, la perte d’autonomie est la principale crainte des Français (40%) par rapport à la vieillesse, loin devant la peur de la maladie (21%) (Enquête de la SOFRES, 14 mai 2007 ; www.agevillagepro.com, 23 mai) ; 68% jugent que la prise en charge des personnes âgées par les pouvoirs publics n’est pas satisfaisante (Actualités sociales hebdomadaires, 18 mai; www.senioractu.com, 18 mai; www.agevillage.com, 14 mai; http://tf1.lci.fr, 14 mai), ce qui encourage le développement soutenu des services à la personne (DARES, Premières synthèses, mai). Et les Français se déclarent solidaires : neuf sur dix se disent prêts à donner du temps à une personne âgée de leur entourage ; trois sur quatre seraient prêts à payer une aide à domicile et trois sur cinq à la prendre en charge chez eux (Enquête FHF, Actualités sociales hebdomadaires, 18 mai; www.agevillage.com, 14 mai).

Comment valoriser cette contribution des aidants ? La France, comme les pays développés, fait face à la gageure de transformer son vieillissement en opportunité. Les retraités aident leur famille en donnant du temps ou de l’argent. En Grande-Bretagne, cette aide est évaluée à 3% du PIB (Les Echos, 28 mai). En Australie, le ministre des Familles a annoncé que les aidants familiaux et les retraités recevront du gouvernement une prime forfaitaire unique (« one-time bonus payment ») pour partager la prospérité économique qu’ils ont contribué à créer. (Family Caregiver Alliance, 23 mai).

Le septième art illustre lui aussi l’importance que revêt la maladie d’Alzheimer et ses conséquences, à travers les films Loin d’elle de Sarah Polley (Pariscop du 16 au 22 mai) et Mémoires de demain de Ken Watanabe (www.comingsoon.net, 16 mai).

Paul-Ariel Kenigsberg
Adjoint au Directeur
Fondation Médéric Alzheimer