L’homme et l’Alzheimer : mémoires émotives, de Jean-François L’Homme
Société inclusive
A Chertsey (Québec), Jean-François L’Homme expose pour la première fois cent soixante-neuf œuvres abordant les intenses émotions reliées aux quatorze années d’accompagnement de sa mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer et décédée en 2009. Les œuvres d’art, créées à partir d’éléments cousus, collés, peints ou dessinés, sont rassemblées en quinze « clans » qui traitent d’émotions ressenties tout au long de la maladie de sa mère, Marie des Anges. L’artiste raconte l’isolement qu’il a vécu : « tout le monde peut t’abandonner. Le futur et le passé ne sont plus là, les gens ont de la misère à vivre dans le présent… Malgré tout l’amour que j’éprouvais pour cette femme, tout en prenant soin d’elle vingt-quatre heures sur vingt-quatre, j’ai ressenti un abandon et un isolement insurmontables, alors que j’avais moi-même terriblement besoin de réconfort. » Certaines créations traitent des multiples deuils qui se succèdent tout au long de la maladie d’Alzheimer, les « deuils blancs ». Il y a aussi le clan nomade, « celui où on essaie de s’ancrer à quelque chose », le clan des anges, celui du passage… « Après d’innombrables après-midis d’enfer, de tristesse et de douleur, j’ai compris que nous avions besoin de quelque chose de tangible qui demeurerait autour de nous et qui nous donnerait l’excitation de continuer à vivre. » Les créations en art visuel sont ainsi nées de plumes, d’écorces, de fils, de branches, de fleurs… L’artiste se souvient que sa mère était très présente et stimulante lors de ces ateliers, desquels restaient une marque, un objet physique qui rappelait à sa mémoire ces moments heureux. « Ce fut notre survie, nous avons étiré la vie de cette façon. » En 2011, Jean-François tente de finaliser son projet, mais il tombe en sévère dépression. La douleur était trop récente. « Je me sentais incapable de revivre l’intensité de ces émotions. » Aujourd’hui, le temps est venu pour l’artiste et le fils de fermer le livre et de passer à autre chose, tant au plan personnel qu’au plan artistique, écrit Élise Brouillette, journaliste à L’Action.