L’évolution de la protection juridique des personnes : le rapport de la mission interministérielle
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Un chiffre donne la mesure de l’urgence : 800 000 personnes sont placées sous tutelle et sous curatelle en France et, du fait du vieillissement de la population, leur nombre ne cesse d’augmenter, rappelle Béatrice Bouniol, de La Croix. Les défaillances dans la prise en charge des personnes en perte d’autonomie sont connues et soulignées par la Cour des comptes et le Défenseur des droits. « Même lorsqu’elle fonctionne, la tutelle renvoie à une sorte de mort civile », constate ainsi en préambule Anne Caron-Déglise, avocate générale à la Cour de cassation, rapporteur de la mission interministérielle sur l’évolution de la protection juridique des personnes. En cause, notamment : une « appréciation principalement sanitaire » des facultés des personnes, déconnectée de l’environnement de vie ; une intervention juridique souvent « perçue comme brutale » ; une prise en compte insuffisante de la volonté de la personne qui ne garantit pas « à leur juste niveau les droits fondamentaux. » Le rapport présente 104 propositions. Il s’agit notamment : 1/d’impulser une réelle politique publique de soutien et d’accompagnement des personnes les plus vulnérables s’appuyant sur les droits fondamentaux, rendant effective la reconnaissance de la capacité de la personne et l’expression de sa volonté, de ses choix et de ses préférences à chaque fois qu’elle est possible, sans l’enfermer ni la stigmatiser. Le rapport préconise de modifier l’article 414 du code civil pour y ajouter « la capacité du majeur est présumée jusqu’à preuve contraire. Elle peut, à titre exceptionnel et sur décision spécialement motivée du juge, être partiellement restreinte » ; 2/ de construire un accompagnement des personnes les plus vulnérables dans une logique de parcours individualisé, notamment par une appréciation des besoins des personnes présentant des altérations de leurs facultés personnelles, et en particulier psychiques ou cognitives, par une évaluation médico-sociale pluridisciplinaire et multidimensionnelle intégrant la dimension juridique de soutien à la capacité pour favoriser une appréciation complète et permettre, si elle est souhaitée et possible, l’organisation de soutiens à l’exercice des droits ; 3/ de consolider les dispositifs d’anticipation choisis par la personne elle-même, notamment en créant un répertoire civil unique de toutes les mesures de protection judiciaires et de directives anticipées, en introduisant des modes de gestion patrimoniale permettant de mieux organiser le risque de dépendance et en particulier la fiducie, en étendant le champ de l’habilitation familiale à l’assistance ; 4/ d’améliorer la réponse judiciaire par une meilleure individualisation des mesures et la priorité donnée au soutien effectif des droits ; 5/ de sécuriser les contrôles et le renforcement de la professionnalisation des mandataires professionnels ; de mieux piloter et articuler la politique publique de protection juridique des majeurs.
Caron-Déglise A (rapp). Rapport de mission interministérielle. L’évolution de la protection juridique des personnes. Reconnaître, soutenir et protéger les personnes les plus vulnérables. Ministère de la Justice, ministère des Solidarités et de la Santé, Secrétariat d’Etat aux personnes handicapées. 21 septembre 2018.
www.justice.gouv.fr/art_pix/rapport_pjm_dacs_rapp.pdf.
www.la-croix.com/France/Justice/Tutelles-rapport-suggere-mieux-proteger-vulnerables-2018-09-21-1200970595, 21 septembre 2018.