L’apathie : mieux la repérer pour mieux l’accompagner

Interventions non médicamenteuses

Date de rédaction :
17 février 2015

Aucune définition actuelle de l’apathie ne fait l’objet d’un consensus unanime, rappelle le neuropsychologue Christophe Reintjens, responsable adjoint des activités de formation à la Fondation Médéric Alzheimer. La définition la plus citée (Marin, 1990) évoque « un déficit persistant de la motivation rapporté par le sujet lui-même ou par l’entourage, avec une diminution des comportements volontaires, des activités cognitives intentionnelles et de la réactivité émotionnelle. Il ne faut pas confondre l’apathie avec la dépression. L’apathie est depuis peu considérée comme un signe cardinal, pathognomonique [qualifiant les signes caractéristiques, spécifiques d’une maladie et qui permettent de poser un diagnostic sans hésitation] d’une entrée dans la maladie d’Alzheimer. Elle est en effet présente chez plus de 50 à 90% des personnes diagnostiquées précocement et engendre une majoration des déficits fonctionnels et cognitifs, ainsi qu’une charge accrue pour les aidants, qu’ils soient familiaux ou professionnels. En effet, explique Christophe Reintjens, les personnes atteintes d’apathie deviennent de plus en plus dépendantes de leurs proches, car elles réduisent leurs engagements dans les tâches de la vie quotidienne tout en exprimant de moins en moins leurs émotions et leur affectivité. « Ces comportements contraindront les aidants naturels à prendre de plus en plus en charge la totalité des tâches dévolues précédemment à la personne apathique, et à mener une lutte permanente afin de l’inciter à réagir ou à s’investir dans une quelconque activité. Paradoxalement, ces stratégies se révéleront particulièrement contre-productives. D’une part, la personne atteinte d’apathie aura tendance, face à une stimulation excessive, à afficher une certaine « volonté de tranquillité. » D’autre part, s’il réduit ses activités, c’est peut-être également car il ne s’en sent plus capable, ou qu’il aurait besoin de certaines adaptations pour y parvenir encore. Ainsi, « faire à la place de » ou stimuler en excès risque d’enclencher un véritable cercle vicieux dans lequel se superposeront la perte d’autonomie et un désintérêt croissant. Une prise en charge extérieure est souhaitable, qu’il s’agisse d’un accueil de jour ou d’une structure de répit, car elle permet de soulager le proche tout en apportant un regard tiers susceptible de dégager des solutions innovantes ou de relancer des activités qui valorisent les compétences de la personne apathique. Pour la Haute Autorité de santé (HAS), la conduite à tenir pour les professionnels repose sur une attitude bienveillante et non stigmatisante envers le patient (« il est apathique et non fainéant ») ; la recherche des potentialités préservées à solliciter et à valoriser afin d’éviter de le mettre en échec ; des stimulations adaptées aux centres d’intérêt et aux capacités du patient ; le choix préférentiel d’environnements familiers et rassurants. »

Reintjens C. Apathie et maladie d’Alzheimer. Doc’Alzheimer 2015 ; 16 : 13-15. Janvier-mars 2015. Haute Autorité de santé. Recommandation de bonne pratique. Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : diagnostic et prise en charge de l’apathie. Juillet 2014.www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2014-10/bat-3v_reco2clicsapathie-alzheimer-071014.pdf (texte intégral).