L’aide à un parent âgé, seul et dépendant : déterminants structurels et interactions, de Quitterie Roquebert, Roméo Fontaine et Agnès Gramain
Société inclusive
Quitterie Roquebert et le Pr Agnès Gramain, du Centre d’économie de la Sorbonne/Paris School of Economics, en collaboration avec Roméo Fontaine, maître de conférences en sciences économiques à l’Université de Bourgogne et chercheur associé du pôle Études économiques et actuarielles de la Fondation Médéric Alzheimer, étudient les déterminants des décisions d’aide de la part des membres d’une fratrie de deux enfants à l’égard d’un parent âgé, seul et dépendant. Les chercheurs distinguent les déterminants structurels (individuels et familiaux) et les interactions (influence de la décision d’un membre de la fratrie sur la décision de l’autre). « Les résultats obtenus sur les données françaises de l’enquête Handicap-Santé de 2008 confirment l’importance du rang dans la fratrie pour comprendre les comportements d’aide. En effet, deux logiques de comportements distinctes apparaissent : si l’aide des enfants est influencée par les caractéristiques du parent quel que soit leur rang, les aînés semblent par ailleurs réagir principalement à la composition de la fratrie, tandis que les cadets adaptent leurs comportements à leurs contraintes personnelles. D’autre part, l’implication de l’autre membre de la fratrie augmente l’utilité d’être aidant pour les aînés, alors qu’elle la diminue pour les cadets. L’aide des aînés se comprendrait alors comme l’acceptation d’une assignation sociale, tandis que celle des cadets répondrait à une logique d’arbitrage, fondée sur la comparaison des coûts et des avantages associés à l’aide. » Pour les chercheurs, « une politique d’aide aux aidants pourrait vraisemblablement renforcer la divergence des comportements entre membres de la fratrie : elle pourrait en effet renforcer l’injonction normative à aider qui pèse essentiellement sur les aînés, et dont l’implication découragerait celle de leurs cadets. A l’inverse, une politique qui encourage le recours à l’aide professionnelle, comme la subvention de l’aide professionnelle, pourrait limiter les écarts au sein de la fratrie, du point de vue de l’implication dans l’aide et, éventuellement, du type de tâches effectuées. Dans une perspective plus large d’économie de la famille, ces résultats permettent en outre de réfléchir à l’allocation intrafamiliale des ressources – et aux éventuelles inégalités intrafamiliales – dans une perspective dynamique. En effet, plusieurs travaux montrent qu’au début du cycle de vie “familial”, à l’enfance des enfants et à l’âge adulte des parents, les aînés font en moyenne l’objet d’un investissement plus marqué de la part des parents (ressources matérielles, suivi scolaire etc.), susceptible d’influencer significativement le niveau de diplôme atteint par les aînés par rapport aux autres membres de leur fratrie. Cette différence de traitement doit être analysée dans une perspective dynamique. En effet, plus tard dans le cycle de vie familial, à l’âge adulte des enfants et durant la vieillesse des parents, les logiques d’allocation des ressources, de la part des enfants vers les parents cette fois-ci, diffèrent à nouveau selon le rang des enfants dans la fratrie. Les aînés sont alors mobilisés d’une manière particulière lorsque la composition de la fratrie semble le désigner prioritairement comme aidant. »
Robert Q et al. L’aide à un parent âgé, seul et dépendant : déterminants structurels et interactions. Documents de travail du centre d’économie de la Sorbonne 2016.30. Mai 2016. ftp://mse.univ-paris1.fr/pub/mse/CES2016/16030.pdf (texte intégral).