La musique comme antalgique : une intervention musicale standardisée et validée
Interventions non médicamenteuses
« La douleur chronique, véritable problème de santé publique, induit toujours des perturbations émotionnelles et cognitives ; ces comorbidités réalisent ainsi un tableau de maladie autoentretenue », écrit Bernard Laurent, du service de neurologie de l’hôpital Nord au CHU de Saint-Etienne (INSERM U1028). L’imagerie cérébrale révèle la superposition de la matrice d’intégration de la douleur avec celles de l’émotion et de la cognition. Les régions frontales sont engagées dans ces trois fonctions et également impliquées dans les contrôles inhibiteurs de la douleur et de l’émotion. Le Pr Jacques Touchon, neuropsychiatre, et le Dr Stéphane Guétin, du centre mémoire de ressources et de recherche (CMRR) du CHU de Montpellier, rappellent que des études cliniques et neurophysiologiques ont mis en évidence le rôle bénéfique de la musicothérapie et des interventions musicales dans la prise en charge de la douleur et l’accompagnement de la personne âgée (Guétin S, Charras K et al ; groupe expert réuni à l’initiative de la Fondation Médéric Alzheimer). La musicothérapie et les interventions musicales peuvent modifier l’évolution de la douleur en s’appuyant sur des effets sensoriels, cognitifs, affectifs, comportementaux et sociaux. Une technique de musicothérapie réceptive a été standardisée au CHRU de Montpellier : la séquence en « U ». Se basant sur les principes de l’hypno-analgésie, la séquence musicale, ajustable de vingt à soixante minutes, est décomposée en plusieurs phases qui amènent progressivement le patient à la détente. L’objectif est de modifier l’état de conscience par des suggestions positives. Les suggestions verbales sont ici remplacées par une induction musicale, modèle archaïque du langage. Cette induction musicale personnalisée en fonction de la préférence émotionnelle et affective du patient, va progressivement amener le patient à un état hypnotique et de relaxation par les variations des composantes musicales comme le rythme, les fréquences, la formation orchestrale et le volume. La phase de conscience est associée à un rythme stimulant, avec un petit orchestre (début : tempo de 80 à 95 pulsations par minute, 10-20 instruments) ; la phase de relaxation est associée à un rythme lent et peu d’instruments (au plus lent : tempo de 30 à 40 pulsations par minute ; 1-3 instruments) ; la phase d’éveil est associée à un rythme modéré (tempo de 60 à 80 pulsations par minute ; 8-10 instruments). Une application numérique intitulée Music Care® a été réalisée en collaboration avec le CMRR de Montpellier. Cette application innovante, labellisée « application de santé », prend en compte les recommandations de la littérature scientifique afin de standardiser la méthode et de la rendre reproductible. Music Care® a été élue meilleure application numérique dans la prise en charge de la douleur par la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) en 2015. Les chercheurs ont fondé en 2011 un premier diplôme universitaire intitulé « Art-thérapie et musicothérapie » à l’Université de Montpellier.
www.agevillagepro.com, 14 février 2017. Laurent B. Douleur chronique : son retentissement émotionnel et cognitif. In Analysis 2017 ; 1(1) : 55-60. Février 2017. www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2542360616300129. Guétin S et al. An overview of the use of music therapy in the context of Alzheimer’s disease: A report of a French expert group. Dementia 2013; 12 (5): 619–634. 1er septembre 2013. http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1471301212438290.