La fin du déni ?

Édito

Date de rédaction :
01 décembre 2005

L’extension de la maladie d’Alzheimer s’accompagne d’un besoin de mieux la connaître qui va, lui aussi, grandissant. Les médias généralistes font écho à cet intérêt, comme en témoignent l’enquête de Paris-Match sur les “ pannes de mémoire ” (édition du 26 janvier 2006), et l’émission télévisée “ Ça se discute ” où des personnes malades et leurs aidants ont pu s’ouvrir de leur expérience et de leurs préoccupations (France 2, 30 janvier 2006 ; Libération, 1er février 2006). La littérature et le théâtre ne sont pas en reste. Aux lecteurs juniors, Claude Gosselin propose un “ Papy Aventure ” à l’imagination galopante (Editions Les 2 encres), cependant que le “ Ravel ” vieillissant du romancier Jean Echenoz vit comme “ enterré vivant dans un corps qui ne répond plus à son intelligence ” (Les Editions de Minuit, janvier 2006). Quant au “ Roi Lear ” mis en scène par André Engel, il donne à voir des symptômes qui ne sont pas sans évoquer ceux de la maladie d’Alzheimer (La Terrasse, janvier 2006). 
Cette “ nouvelle culture de la démence ” qui restitue au sujet malade son statut d’individu doté d’une vie psychique et relationnelle, certes altérée mais qui persiste, a de multiples incidences au plan éthique, explique Christian Derouesné (Gérontologie et Société, décembre 2005). Ainsi, la communication de son diagnostic à la personne malade se pose en termes renouvelés, non seulement parce qu’il sera bientôt possible de diagnostiquer la maladie à un stade pré-symptomatique (Soins Gérontologie, janvier-février 2006), mais aussi parce que la compréhension de son état diminuant avec la progression de la pathologie, le sujet doit pouvoir disposer précocement des informations lui permettant de réorganiser sa vie (article de R. Gil, in Neuropsychologie Psychiatrie Gériatrie, décembre 2005). Au delà de l’annonce du diagnostic, la question du consentement aux soins des personnes malades nécessite une vigilance particulière, notamment pour se garder de tout abus de confiance et de pouvoir, fait observer le Pr Moulias (Gérontologie, n° 137, 1er trimestre 2006). De fait, quelles que soient les pathologies et, plus encore, en cas de déclin des facultés cognitives, le rapport soignant-soigné est fondamentalement marqué du sceau de l’asymétrie, analysent les contributeurs de la revue Esprit qui étudient les “ figures du soin ” (janvier 2006). Face à cette inégalité des positions, insistent-ils, le respect de l’autre constitue l’horizon indépassable d’une relation de soin véritablement éthique.
Partie prenante de cette dyade thérapeutique, les aidants familiaux souhaiteraient davantage de dialogue avec les professionnels, souligne Caroline Laporthe (Gérontologie et Société, décembre 2005). Ils revendiquent aussi un statut qui reconnaisse la spécificité de leur place. De facto, celle-ci est capitale dans un système de soins qui érige le maintien à domicile en priorité. Pour le faciliter, plusieurs sources de financement sont mobilisables, qui se trouvent au cœur de l’actualité (agevillage.com et agevillagepro.com, 16 janvier 2006 ; Santé Social, janvier 2006 ; senat.fr, 6 janvier 2006 ; Les Cahiers de la FNADEPA, décembre 2005 ; questions.assemblee-nationale.fr, 12 janvier 2006). Parallèlement, les différents métiers de service à la personne, ainsi que leurs modalités d’agrément et les avantages fiscaux afférents sont, eux aussi, clairement définis (Actualités sociales hebdomadaires, 9 et 16 décembre 2005, 6 et 20 janvier 2006 ; Les Echos, 2 janvier 2006 ; Santé Social, décembre 2005 ; Directions, janvier 2006). Tragédie individuelle, mais aussi drame familial et social (Au fil du mois, CREA PACA Corse, article de Ph. Pitaud et M. Richetto-Redonet, décembre 2005), la maladie d’Alzheimer semble bel est bien sortie du déni. 
Caroline Helfter