Financement de la dépendance : ne pas oublier la maladie d’Alzheimer

Droit des personnes malades

Politiques

Date de rédaction :
11 août 2020

Hélène Jacquemont, présidente de la Fondation Médéric Alzheimer, relève que le ministère n’a pas mentionné la maladie d’Alzheimer dans la réflexion des groupes de travail de la consultation nationale Grand âge et autonomie. Faut-il y voir un simple oubli, la volonté de ne pas stigmatiser une catégorie de personnes ou bien, plutôt, le choix assumé d’une approche globale des enjeux de la perte d’autonomie ? s’interroge-t-elle. Elle estime que le phénomène Alzheimer n’est pas totalement soluble dans la dépendance. La future loi devra trouver un juste équilibre entre les approches mutualisées et les réponses originales que cette maladie réclame. Si les stratégies de prévention de la dépendance doivent être globales – ce qui est bon pour le cœur l’est aussi pour le cerveau -, que dire en revanche du repérage précoce de la maladie d’Alzheimer, de son éligibilité à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) aujourd’hui insuffisants car fondés sur des outils inadaptés ? De la même manière, l’accompagnement professionnel et familial des personnes ayant des troubles cognitifs s’apparente, en phase sévère, à l’accompagnement des handicaps physiques les plus lourds. Le paradigme du handicap qui insiste davantage sur les stratégies de compensation que sur les incapacités est, à cet égard, inspirant pour les maladies neurodégénératives et milite pour une approche décloisonnée. Pour autant, poursuit Hélène Jacquemont, la perte de la capacité à prendre des décisions autonomes est propre aux maladies neurodégénératives et requiert des dispositifs de compensation originaux qui restent à imaginer et à financer. Quant à l’hébergement, qu’il s’agisse du domicile ou de solutions collectives, les personnes vivant avec la maladie d’Alzheimer et leurs proches sont confrontées à des difficultés d’une ampleur particulière qui mérite d’être considérée. Tout comme le financement des interventions non médicamenteuses, dont l’efficacité est pourtant reconnue pour ce type de maladie, et qui est encore quasi inexistant. Agnès Buzyn a évalué à 1,6 million le nombre des personnes âgées qui seront en perte d’autonomie en 2030. Sans éluder la question des critères de définition administratifs et substantiels de la dépendance, on peut estimer que les personnes de plus de 85 ans dépendantes atteintes de troubles cognitifs sont d’ores et déjà plus de 600 000 en France. Par ailleurs, cette proportion croît fortement avec l’avancée en âge. Ainsi, alors que 4 % des septuagénaires vivent avec des troubles cognitifs, 20 % des octogénaires sont concernés et 40 % des nonagénaires. Nous savons aussi que nous allons être confrontés à une forte augmentation du nombre de personnes vivant en France avec des troubles cognitifs. Elles sont 1,1 million aujourd’hui. Elles seront 1,7 million en 2030 et leur nombre dépassera les 2 millions en 2040, alerte Hélène Jacquemont. Le coût du financement de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées va corrélativement augmenter. Il s’élève aujourd’hui à 32 milliards d’euros par an, dont 14 supportés par les ménages au titre de l’aide informelle. Dans ces conditions, estime Hélène Jacquemont, la future loi sur l’autonomie et le grand âge ne doit pas faire l’impasse sur les spécificités de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées si elle entend répondre efficacement à la situation de dépendance des personnes vivant avec des troubles cognitifs.

www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/0600251723069-financement-de-la-dependance-noublions-pas-alzheimer-2226352.php, 2 décembre 2018.