Est-ce que je serai toujours moi ? Trouver un sens continu de soi dans l’expérience vécue de la démence, de Christine Bryden

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
23 juin 2020

« Je me réveille chaque jour et je me sens toujours comme Christine, même si je ne sais pas le jour qu’il est ou ce qui s’est passé hier. » Ce sont les paroles de Christine Bryden, personne malade depuis 1995 et qui, dans son dernier livre, affirme que la perte des capacités cognitives ne devrait pas être assimilée à la perte du sens de soi. Bryden dit que le pire, lorsqu’elle a reçu son diagnostic, c’est qu’elle a imaginé qu’elle allait graduellement « se perdre elle-même ». « Comment pourrais-je faire face à la perte de mon cerveau avec le temps car cela signifierait sûrement perdre qui j’étais ? » Elle était terrifiée parce qu’elle était convaincue de l’idée commune que chez une personne au stade avancé de la maladie, « l’esprit est absent et le corps est laissé comme une coquille vide ». Elle souligne à quel point la société semble privilégier l’intelligence par rapport à tous les autres attributs personnels et est consciente que, dans sa vie de haut fonctionnaire avant la maladie, elle a fait de son propre intellect un élément clé de son identité. Mais ayant vécu avec la maladie pendant de nombreuses années, et pleinement consciente que ses capacités intellectuelles sont en déclin, elle constate : « mon sens objectif de moi-même demeure, percevant et interagissant avec mon environnement matériel, social et spirituel en constante ». Christine Bryden avertit : considérer les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée comme des « coquilles vides » les déshumanise, les expose au risque de négligence et de maltraitance. Elle interpelle les cliniciens, leur reprochant de se concentrer uniquement sur les pertes : « ce que nous ne pouvons plus faire, pas sur ce que nous pouvons encore faire ou pourrions être encouragés à faire, et ne mettre en relief que nos carences. » Elle s’interroge sur les représentations erronées de la maladie : on ne devrait pas supposer qu’une personne malade dont les aptitudes du langage ont changé n’a pas de pensées ou de sentiments : « nous, les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée, avons besoin que les autres nous accordent le bénéfice du doute, qu’ils présument que nous sommes des personnes à part entière et que nous avons des opinions que nous essayons de transmettre. Essayez de nous comprendre, ayez de la patience et surtout, donnez-nous du temps. »

Bryden C. Will I Still Be Me? Finding a Continuing Sense of Self in the Lived Experience of Dementia. 2018. 144 p. ISBN: 978-1-7859-2555-9. Londres : Jessica Kingsley. www.jkp.com/uk/will-i-still-be-me-1.html.