ÉDITORIAL

Édito

Date de rédaction :
04 octobre 2021

Le 22 septembre 2020, le président de la République, en visite à l’EHPAD La Bonne-Eure de Bracieux (Loir-et-Cher), déclarait : « Nous avons réappris notre vulnérabilité qui est plus grande avec l’âge, nous avons regardé en face le vieillissement ; on peut s’en féliciter et début 2021, nous allons bâtir une loi très concrète pour réinvestir le grand âge. » Il voulait une loi sur l’autonomie, « extraordinairement ambitieuse. » Un an plus tard, la crise sanitaire a rebattu les priorités et modifié les politiques en faveur de l’autonomie des personnes âgées. Faute à l’épidémie, faute de temps, faute de moyens, la loi Grand âge a été enterrée !

Faute d’une loi, le gouvernement a annoncé certaines mesures sur la dépendance dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022, dans le cadre de la nouvelle branche autonomie, créée en 2021. « Mais ce n’est pas suffisant, affirme Hélène Jacquemont, présidente de la Fondation Médéric Alzheimer, le bien vieillir de nos aînés ne peut se résumer à une équation financière. ».

Pierre Gouabault, directeur de l’EHPAD qui avait reçu le Président, est lui aussi déçu : « Une loi, c’est un cadre républicain qui définit le regard que l’on porte collectivement sur les plus fragiles. Il faut que les gens puissent croire en un modèle qui les accompagnera, qu’ils vivent en milieu rural ou en ville, qu’ils aient des proches ou pas. Qu’on prenne l’engagement d’un service public accessible pour tous. Je vois un sentiment d’injustice terrible chez les familles car on ne choisit pas la dépendance. »

Au lendemain de la Journée mondiale Alzheimer 2021, qui marquait 20 ans de politiques publiques spécifiques dans le domaine (trois plans Alzheimer, puis un plan et une feuille de route pour les maladies neurodégénératives), la maladie d’Alzheimer aurait-elle disparu des radars du gouvernement ? Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, ne l’a pas évoquée dans sa présentation du PLFSS 2022. Brigitte Bourguignon, ministre déléguée à l’Autonomie, ne l’a mentionnée qu’une fois ! Reconnaissant la part croissante des maladies neurodégénératives chez les résidents d’EHPAD, elle propose un financement de 115 millions d’euros pour leur accompagnement, en recrutant des personnels spécialement formés, en particulier « sur les enjeux Alzheimer. ».

L’espoir résidera peut-être dans l’appel de dix-huit parlementaires, sous l’égide du député de Lozère Pierre Morel-A-l’Huissier (UDI), afin de « revoir entièrement la prise en charge de la maladie d’Alzheimer et à l’inscrire au plus haut des priorités de santé. Ils demandent une parole politique forte, pour faire évoluer la mentalité autour de ces maladies : ne plus « voir les malades par ce qu’ils n’ont plus, mais par ce qu’ils continuent de développer. » Ils appellent à renforcer une approche sociale complémentaire à l’approche médicale : « l’enjeu est trop important, nous ne pouvons plus reléguer et précariser les personnes atteintes et leur entourage. » 

Au-delà de nos frontières, le constat est sans appel. Alzheimer’s Disease International et Alzheimer Europe alertent les gouvernements du monde entier : les progrès rapides du diagnostic, à un stade de plus en plus précoce, vont susciter une demande croissante de services de santé à laquelle aucun pays n’est préparé.

La France qui va prendre la présidence du Conseil de l’Union européenne se doit d’être exemplaire ! Il devient donc urgent de ne plus oublier ceux qui oublient.

Christine Tabuenca
Directrice générale de la Fondation