Diagnostic : approches ethniques et culturelles (1)
Échos d'ailleurs
Pourquoi les personnes malades issues de minorités ethniques se présentent-elles plus tardivement dans les services de prise en charge spécialisée de la démence ? Naheed Mukadam et ses collègues, du département de santé mentale de l’University College de Londres, ont suivi le parcours de dix-huit aidants de personnes atteintes de démence, issues des principaux groupes ethniques présents au Royaume-Uni. Les aidants de ces communautés retardent le recours à l’aide jusqu’au moment où ils ne peuvent plus faire face, ou jusqu’à ce que d’autres commentent leurs problèmes. Ils pensent souvent que les familles doivent s’occuper de leurs propres aînés et qu’un diagnostic seul ne sert à rien (purposeless). Les croyances (beliefs) des aidants, concernant les causes du déficit cognitif, les aspects négatifs de la psychiatrie et le sens de la responsabilité familiale, constituent un important obstacle au diagnostic précoce. Les auteurs souhaitent explorer si une intervention peut modifier ces attitudes, afin que les familles comprennent qu’un diagnostic peut permettre de planifier l’aide et éviter les crises, et ne signifie pas un échec du devoir (failure in duty), une déloyauté ou un abandon du rôle d’aidant.
Aux Etats-Unis, une étude des services de psychiatrie, comportement humain et médecine familiale de l’Université Thomas Jefferson de Philadelphie (Rovner et al) montre que la reconnaissance des troubles cognitifs est influencée par les perceptions ethniques et le niveau d’éducation. A l’Université de Pennsylvanie, l’équipe de Jason Karlawish propose une approche pluridisciplinaire (gériatrie, économie, éthique, médecine de famille, anthropologie) analysant le discours de cent vingt Portoricains d’origine hispanique ou d’origine européenne non hispanique, aidants ou non aidants de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Il existe des différences notables entre les deux groupes ethniques. Les latino-américains n’utilisent pas le terme « aidant » (caregiver), mais parlent plutôt d’une bonne épouse faisant preuve d’intelligence, de patience et d’attention envers la personne malade. Pour ce groupe, les bénéfices de la recherche sont assimilés à la prise en charge clinique. Ces différences de perceptions doivent être prises en compte dans la conception des essais cliniques, la prise en charge, les interventions auprès de ces publics spécifiques et les documents d’éducation à la santé. L’Association Alzheimer américaine propose un atelier de repérage des premiers signes, animé en espagnol.
Mukadam N et al. A systematic review of ethnicity and pathways to care in dementia. Int J Geriatr Psychiatry 2011; 26(1):12-20. Janvier 2011. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21157846. Mukadam N et al. Why do ethnic elders present later to UK dementia services ? A qualitative study. Int Psychogeriatr, 24 février 2011. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21349212. Rovner BW et al. Racial Differences in the Recognition of Cognitive Dysfunction in Older Persons. Alzheimer Dis Assoc Disord, 10 mars 2011. www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21399482. Karlawish K et al. What Latino Puerto Ricans and non-Latinos say when they talk about Alzheimer’s disease. Alzheimer’s and Dementia 2011; 7(2): 161-170. www.alzheimersanddementia.com/article/S1552-5260(10)00100-7/abstract. www.ajc.com, 7 mars 2011.