Deuil blanc : deuil d’un vivant
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Le deuil blanc, c’est le type de deuil ressenti par l’aidant lorsqu’un proche atteint d’un trouble cognitif n’a plus la même présence mentale ou affective que par le passé, bien qu’il soit encore présent sur le plan physique, explique Elisabeth Rieu, psychologue au centre hospitalier de Pau. Dans la bouche des aidants, l’expression qui revient le plus souvent est : « Je ne le reconnais plus. » Ils expriment la perte de l’expression cognitive, de la qualité relationnelle, de l’image qu’ils avaient de l’autre et de ce qu’ils pouvaient aimer de lui. C’est une perte de repères, de projets, de liberté. Il ne s’agit pas d’un deuil unique mais d’un enchaînement de deuils qui interviennent en miroir de l’évolution de la pathologie : à chaque nouvelle perte vécue par l’aidant correspond un nouveau réaménagement psychique. C’est un mouvement psychologique perpétuel, un cycle susceptible de fatiguer voire d’épuiser l’aidant, si la situation n’est pas identifiée. Le deuil blanc est une période. On ne peut pas lister les pertes de manière exhaustive, ni les hiérarchiser. Tout dépend de la nature de la relation antérieure entre l’aidant et le patient et de la force de l’identité de ce dernier avant la maladie. À l’hôpital de Pau, Elisabeth Rieu propose des séances de groupe dans lesquelles elle aborde la maladie avec les proches d’un point de vue médical, social, psychologique. Cette approche permet de rompre l’isolement. C’est en soi un phénomène très thérapeutique pour un aidant que de comprendre qu’il n’est pas seul dans sa situation. Elle essaie de créer de l’espace pour que se mette en place une nouvelle relation entre le patient et son proche. Même si la communication intellectualisée n’est plus possible, la communication émotionnelle reste, rappelle-t-elle. « On ne réinvente pas une relation de A à Z. Cette relation a été vécue. On ne règle pas ses comptes à ce moment-là. Alors on va travailler sur l’acceptation et la résilience. L’acceptation des choses du passé qui ne pourront pas être réglées aujourd’hui. »