Des jardins accueillants pour des personnes atteintes de troubles cognitifs : l’architecture du paysage (1)

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Approches psychosociales

Date de rédaction :
02 septembre 2020

Dans la conception et la construction des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, le coût des jardins et la quantité de travail nécessaire est souvent sous-estimée. Cela a pour conséquence des espaces extérieurs souvent inaccessibles, inadaptés et mal conçus. Kevin Charras, Jean-Bernard Mabire et Jean-Pierre Aquino, du Living Lab de la Fondation Médéric Alzheimer, Corinne Bébin, de la plateforme gérontologique Solidarité Versailles Grand Age et Véronique Laulier, directrice de la formation continue de l’Ecole nationale supérieure du paysage de Versailles (Yvelines), décrivent comment leurs trois organisations ont collaboré pour concevoir un cadre conceptuel en architecture du paysage répondant aux besoins des personnes âgées fragiles. Trois approches (scientifique, pédagogique et pratique) ont été utilisées. Six dimensions consensuelles ont été identifiées. Trois sont liées à l’utilisation de l’espace (attractivité et maîtrise sur l’environnement extérieur, usages sociaux, curiosité) et trois sont liées aux aspects techniques de l’architecture du paysage (accessibilité et ergonomie, composition, gestion végétale). Ce cadre conceptuel a été élaboré avec deux objectifs : d’une part éviter les incongruences lorsque les caractéristiques de l’environnement diffèrent d’un endroit à un autre (climat, contexte culturel ou état de santé des utilisateurs) ; d’autre part, proposer des recommandations suffisamment larges pour permettre aux architectes paysagers et aux professionnels de l’aide et des soins de concevoir des espaces extérieurs créatifs, originaux et adaptés aux besoins des personnes âgées fragiles. Un atelier de formation de 5 jours a été ensuite proposé à des élèves architectes de l’École nationale supérieure du paysage de Versailles. Les deux premiers jours ont été consacrés aux connaissances théoriques et à des entretiens avec des utilisateurs, des aidants professionnels et des responsables municipaux ; les trois autres jours ont été consacrés à la pratique. Le lieu d’implantation est L’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) Lépine-Versailles, géré par le centre communal d’action sociale (CCAS). La plateforme gérontologique Solidarités Versailles Grand Age a souhaité que les jardins puissent faire se rencontrer les personnes atteintes de troubles cognitifs et les enfants de l’école maternelle voisine. La mairie a aussi spécifié le besoin de relier le projet aux espaces publics voisins et d’intégrer le contexte culturel de Versailles en référence à André Le Nôtre, jardinier de Louis XIV. La plupart des résidents et des familles ont souhaité des espaces sécurisés pour éviter tout trouble avec l’extérieur. Très peu d’utilisateurs étaient intéressés par le jardinage lui-même, et souhaitaient profiter du jardin à la condition qu’ils ne soient pas obligés de participer à son entretien. Les utilisateurs physiquement mobiles ont demandé des espaces ouverts pour marcher et regarder les jeunes jouer au basket-ball, les anciens à la pétanque et les enfants grimper dans l’aire de jeux. Les professionnels étaient davantage intéressés par les questions de sécurité et de protection des utilisateurs. Ce sont ces deux dimensions qui ont été privilégiées par les administrateurs de la plateforme gérontologique. Les élèves ont présenté un projet pour un jardin, des terrasses et un patio intérieur. Le projet a été réalisé.

Charras K et al. Designing dementia-friendly gardens: a workshop for landscape architects. Innovative practice. Dementia (London), 25 octobre 2018. www.pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30360652/.