Dégénérescence des synapses et plasticité cérébrale
Recherche
Les causes de la maladie d’Alzheimer sont multifactorielles, et la recherche préclinique s’est orientée vers la compréhension des mécanismes moléculaires des facteurs de risque. Ces mécanismes sont complexes. Au gré des découvertes, les médias s’enflamment souvent pour tout résultat tendant à privilégier telle ou telle piste, au risque, parfois, de simplifier la compréhension des causes de la maladie dans l’esprit du grand public. D’autres clarifient les points de vue. Aude Rambaud, du Figaro, s’interroge : « la maladie d’Alzheimer serait-elle finalement peu neurodégénérative ? S’agirait-il plutôt d’un problème de fonctionnement des neurones ? Les chercheurs feraient-ils fausse route depuis plusieurs années ? » Salah El Mestikawy, de l’Institut universitaire en santé mentale de l’université McGill de Montréal (Québec), en collaboration avec Stéphanie Daumas, de l’Institut Neurosciences-Paris-Seine et ses collègues, ont étudié, dans les cerveaux de 171 personnes décédées avec une maladie d’Alzheimer, le déclin des marqueurs synaptiques (des protéines présentes dans les espaces entre les neurones, qui permettent la transmission des signaux nerveux aux neurones voisins). Contrairement à la perte massive de synapses qui était attendue, les chercheurs n’ont constaté qu’une disparition mineure de celles-ci, sans corrélation avec le niveau de sévérité de la pathologie. Pourtant, l’atrophie est indiscutable, clarifie le Pr Philippe Amouyel : la taille de nombreuses aires cérébrales est réduite, indiquant une baisse de densité des neurones dans le cerveau. C’est même un outil de diagnostic pour la maladie », clarifie le Pr Philippe Amouyel, directeur de recherche à l’Institut Pasteur de Lille. Perte de neurones ne veut pas dire automatiquement perte de synapses, prévient-il. « La mort de l’un d’eux est associée à des remaniements synaptiques dans l’environnement pour contourner cette perte en créant de nouvelles connexions entre les cellules restantes. Cela s’appelle la plasticité cérébrale. On ne peut donc pas exclure que la dégénérescence de neurones s’accompagne de la formation de nouvelles synapses ailleurs, ce qui expliquerait le fait qu’elles disparaissent finalement peu. L’étude ne permet pas de le savoir, car les auteurs n’ont pas évalué la mort neuronale et se sont focalisés sur les synapses. Par contre, si elles restent nombreuses, il est fort probable qu’elles ne fonctionnent pas bien, ce qui justifier l’aggravation des symptômes. »
Poirel O et al. Moderate decline in select synaptic markers in the prefrontal cortex (BA9) of patients with Alzheimer’sdisease at various cognitive stages. Sci Rep, 17 janvier 2018.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5772053/pdf/41598_2018_Article_19154.pdf (texte intégral). http://sante.lefigaro.fr/article/une-nouvelle-piste-pour-expliquer-alzheimer/, 6 février 2018.