Comment les proches aidants voient-ils leur propre perte d’autonomie ?

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
04 juin 2020

Les Français souhaitent majoritairement, en cas de dépendance, rester vivre chez eux, rappelle Julien Damon, professeur associé à Sciences-Po Paris et conseiller scientifique de l’École nationale supérieure de sécurité sociale (EN3S) à Saint-Etienne (Loire). Ils demandent une implication accrue des pouvoirs publics, concevant, pour une majorité plus réduite d’entre eux, qu’il soit nécessaire de cotiser et d’épargner davantage. Pour le quart de la population impliquée dans l’aide aux personnes dépendantes, les demandes de soutien sont élevées.

Et si l’on analysait les attentes non pas de l’ensemble des Français, mais celles des seuls aidants de personnes déjà en perte d’autonomie ? En partenariat avec Adef Résidences, Fondation Partage et vie, AG2R La Mondiale et Korian, les sociologues Mélissa Petit et Thierry Calvat, du Cercle Vulnérabilités et sociétés, ont mené une enquête auprès de 851 proches de personnes en perte d’autonomie résidant en EHPAD (85,2 %), à domicile (6,0 %), en résidence senior (3,3 %), en résidence autonomie (2,8 %), en foyer-logement (1,5 %) ou au domicile de l’aidant (1,1 %). Sept aidants sur dix sont des femmes, enfants des personnes dépendantes ; 17 % habitent en zone urbaine, 43 % en zone péri-urbaine et 30 % en zone rurale. Près de 7 aidants sur 10 sont satisfaits du lieu de vie actuel de la personne en perte d’autonomie. La sécurité, la disponibilité des professionnels et la prise en compte de la personne constituent les principales qualités. La principale critique porte sur le coût des lieux de vie, l’axe de progrès le plus écrasant. Les autres critiques portent principalement sur la prise en compte de la personne et de ses besoins spécifiques. Pour les proches aidants, la conception du bien vieillir est d’abord le fait d’être bien entouré (69 %), avant d’être en bonne santé (31 %). Les sociologues ont demandé aux répondants de se projeter et d’imaginer la solution qui serait la plus appropriée s’ils devenaient eux-mêmes dépendants. La crainte principale des proches est une perte d’autonomie liée à un problème cognitif (perte de mémoire, perte de repères, désorientation (70 %), avant la perte d’autonomie liée à un problème physique (difficultés à se déplacer, à sortir (29 %). C’est l’EHPAD qui apparaît comme étant la solution la plus adaptée, sollicitée par 32 % des personnes interrogées, loin devant le logement individuel, avec un partage de pièces de vie commune dans le cadre d’un quartier ou d’un immeuble aménagé en ce sens (21 %). Le domicile actuel, même accompagné d’une surveillance médicale personnalisée 24 heures sur 24, n’arrive qu’en 3e position (18 % des répondants). Quel que soit leur lieu de vie pour demain, les critères les plus importants pour les proches sont la préservation de leur autonomie et de contribution à la société (52 % des répondants), et la qualité des soins (51 %). Les facteurs qui auront le plus d’influence sur leur capacité de vieillir sont les décisions publiques touchant au financement du grand âge et de la dépendance (46 %) ; la place accordée aux seniors dans la société (22 %) ; les progrès de la médecine et de la prise en charge médicale (16 %) ; les décisions publiques touchant à la retraite ou à la durée de la vie professionnelle (9 %), les nouvelles technologies (3 %).

Damon J. Prise en charge de la dépendance : les attentes des Français. Rev Dr Sanit Soc 2019 ; 587 : 747-755. Juillet-août 2019. www.vulnerabilites-societe.fr/wp-content/uploads/2019/08/Synthe%CC%80se-enque%CC%82te-lieux-de-vie-aout-2019-2.pdf, 27 août 2019 (texte intégral). www.agevillage.com/actualite-18067-1-Les-Ehpad-pas-si-mal-aimes.html, 2 septembre 2019.