Altercations et harcèlement entre résidents

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
21 juillet 2020

Le phénomène est mal connu, et les études sur le sujet sont rarissimes. Eilon Caspi, de l’Ecole infirmière de l’Université du Minnesota (Etats-Unis), a étudié, de 1988 à 2017, les circonstances de la mort de 105 résidents suite à une altercation avec d’autres résidents, l’un des deux au moins étant atteint de démence. Les sources de données sont les articles de journaux et les certificats de décès, au Canada, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et à Singapour. Les victimes étaient âgées en moyenne de 84.5 ans et les agresseurs de 75.2 ans. Les agresseurs sont à 74% des hommes. 59% des altercations mortelles ont eu lieu dans les chambres et à 43% entre voisins de chambre. Le personnel n’était pas témoin dans 62% des cas. Dans 44% des cas, la victime a été poussée et dans 22% des cas frappée au visage. Des blessures à la tête sont observées dans 50% des cas, des fractures de hanche dans 33% des cas. Les causes de décès sont des blessures traumatiques à la tête (29%), des complications de fracture (20%), des pneumonies (11%), des strangulations ou suffocations (10%). 24% des victimes sont décédées le même jour et les autres 16 jours après l’alterc          ation. Pour Eilon Caspi, les expressions comportementales jugées « agressives » résultent de besoins humains insatisfaits et ont un sens qu’il faut découvrir. Ces comportements constituent des tentatives de communication qui doivent être explorées et validées ; des tentatives de prise de contrôle sur des situations non désirées, frustrantes ou menaçantes ; des tentatives pour exprimer son identité et sa dignité.

Est-il possible d’éliminer le harcèlement entre résidents et prévenir les comportements difficiles chez les personnes atteintes de démence ? La consultante Judy Berry a créé et dirigé pendant 17 ans Lakeview Ranch, un établissement d’hébergement spécialisé pour des personnes atteintes de démence, exclues d’autres maisons de retraite en raison de leur comportement difficile, et hospitalisées de façon répétée en hôpital psychiatrique. Une étude menée auprès de 230 résidents, en collaboration avec le département de gérontologie de l’Université d’Etat de Saint Cloud (Minnesota) a montré qu’il était possible d’éliminer 93% des hospitalisations en adoptant une approche centrée sur la personne et en réduisant les psychotropes : « en trois semaines, nous pouvions voir la personnalité de ces malades revenir, à mesure qu’ils sortaient du brouillard induit par les médicaments. » 49% des résidents avaient été hospitalisés en moyenne 2.13 fois en psychiatrie l’année précédant leur entrée à Lakeview Ranch, 0.07 fois ensuite. Cette différence est significative. L’utilisation des psychotropes a été réduite chez 26% des résidents. En 2010, Judy Berry a reçu le Prix national des leaders de santé de proximité pour cette approche (Lakeview Ranch Model of Care).

Caspi E. The circumstances surrounding the death of 105 elders as a result of resident-to-resident incidents in dementia in long-term care homes. J Elder Abuse Negl, 31 mai 2018. http://boomertechtalk.com/eilon-caspi/, 22 avril 2018. Caspi E. Deaths as a Result of Resident-to-Resident Altercations in Dementia in Long-Term Care Homes: A Need for Research, Policy, and Prevention. J Am Dir Assoc 2016 ; 17(1) : 7-11. www.jamda.com/article/S1525-8610(15)00640-4/pdf. Janvier 2016. Berry J et al. Managing Challenging Aggressive Behavior in Persons with Dementia: Cost Effectiveness of Prevention versus Treatment.  Poster, 61st Annual Scientific Meeting of the Gerontological Society of America, National Harbor, Maryland (USA). 24 novembre 2008.

www.dementiaspecialistconsulting.com/images/prevention_Vs_treatment2008.pdf

(texte intégral).