Aducanumab : le laboratoire Biogen explique les résultats contradictoires de ses derniers essais cliniques

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Date de rédaction :
12 mai 2020

Le 22 octobre 2019, dans une communication aux investisseurs, le laboratoire Biogen avait présenté les résultats de ses 2 essais cliniques parallèles de phase 3 (à grande échelle chez l’homme) testant l’efficacité et la sécurité de l’aducanumab, un anticorps monoclonal dirigé contre la plaque amyloïde, chez 3 200 patients au stade du déficit cognitif léger. Cette communication, présentée comme une percée scientifique alors que les résultats des 2 essais étaient contradictoires, avait permis de redresser de 40 % le cours de l’action. Le 5 décembre 2019, au congrès sur les essais cliniques sur la maladie d’Alzheimer (CTAD) à San Diego (États-Unis), le laboratoire Biogen a présenté les détails des résultats à la communauté scientifique internationale. Les avis des experts sont très mitigés : l’un des essais (EMERGE) montre une réduction significative de 22 % du déclin cognitif et de 40 % du déclin fonctionnel (impact sur les activités quotidiennes) dans un sous-groupe de patients ayant reçu la dose la plus forte de la molécule et sur une période longue ; le second essai (ENGAGE) ne confirme pas ces résultats.

Budd Haeberlein, directrice du développement clinique de Biogen, livre l’explication suivante sur les résultats contradictoires des deux essais. L’un des principaux facteurs d’analyse, dit-elle, porte sur la façon dont les essais ont traité les participants qui présentant une variante génétique appelée APOEε4 qui les exposait à un risque accru d’œdème cérébral comme effet secondaire du médicament. Dans l’ensemble, environ un tiers des patients recevant une dose élevée d’aducanumab présentaient cet œdème, qui causait parfois des symptômes tels que maux de tête, étourdissements et nausées, mais qui disparaissait généralement dans les 4 mois. Les chercheurs ont commencé à administrer aux patients à risque élevé d’œdème cérébral l’aducanumab avec une dose plus faible par mesure de précaution, mais en 2017, ils ont décidé qu’ils pouvaient augmenter en toute sécurité la dose la plus élevée de l’essai. ENGAGE a commencé environ un mois avant EMERGE et comptait un plus grand nombre de participants au moment du changement. Par conséquent, ENGAGE s’est retrouvé avec une plus petite proportion de ses participants ayant reçu la dose élevée, ce qui pourrait expliquer l’absence de bénéfice. Lorsque Biogen a analysé le sous-groupe de participants qui ont reçu cette dose élevée et constante d’aducanumab après le changement de protocole – près de 300 personnes pour chaque essai clinique – le laboratoire a constaté une réduction d’environ 30 % du déclin cognitif comparativement au placebo dans ENGAGE et EMERGE.

www.sciencemag.org/news/2019/12/skepticism-persists-about-revived-alzheimer-s-drug-after-conference-presentation, 5 décembre 2019.