Musique : de nouvelles clés sur le cerveau

Interventions non médicamenteuses

Date de rédaction :
01 février 2014

Pascale Santi, du Monde, publie une double page dans la rubrique sciences et médecine, consacrée aux effets de la musique sur le cerveau des personnes atteintes de troubles cognitifs. « Une chanson nouvelle d’une dizaine de lignes devient familière aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer en moins de huit semaines (huit séances d’une heure trente), la présentation du texte ou les première notes chantées suffisent pour que les malades entonnent la maladie », constatent Odile Letortu, médecin coordonnateur à la résidence des Pervenches de Biéville-Beuville (Calvados) et Caroline Mauger, neuropsychologue au CHU de Caen, de l’équipe d’Hervé Platel, professeur de neuropsychologie et chercheur à l’unité INSERM U1077, l’un des premiers à avoir identifié les réseaux neuronaux impliqués dans la perception et la mémorisation de la musique. La mémoire musicale partage, avec celle des mots, des zones de l’hémisphère gauche, tandis que l’hémisphère droit permet l’analyse perceptive de la mélodie. Concrètement, un son est d’abord traité par le système auditif, puis interviennent différentes zones du cerveau impliquées dans la mémoire (émotions, mouvement…). En outre, le cerveau peut sécréter des neuromédiateurs (sérotonine, dopamine…) à l’écoute d’un morceau plaisant. Des malades apathiques, aphasiques, ayant des troubles du comportement, se mettent à chanter, sourire, communiquer. Si le chant est fréquemment proposé dans les maisons de retraite, ce qui est nouveau, c’est que les résidents se souviennent de mélodies nouvelles. Pour Hervé Platel, « la question qui se pose est de savoir si ce sont les zones cérébrales qui fonctionnent encore qui permettent cet apprentissage nouveau, ou si un circuit de mémoire implicite, alternatif, prend le relais ».

L’équipe d’Hervé Platel a étudié quarante sujets jeunes, dont la moitié de musiciens. Chez les musiciens, il existe une densité de neurones plus importante dans la partie antérieure de l’hippocampe gauche. Les régions occipitales et le gyrus cingulaire, zone du cortex cérébral qui intervient dans les comportements, les émotions et la mémoire, sont aussi davantage sollicitées chez les musiciens. Ce circuit est impliqué dans la mémoire épisodique, qui associe la musique au contexte dans lequel elle a été écoutée. « L’hippocampe des musiciens chevauche les souvenirs », titre la journaliste Pascale Santi, dans une métaphore équestre. « La pratique musicale pourrait bien être une activité stimulante qui permettrait de lutter contre les effets du vieillissement cognitif », explique la neuropsychologue Mathilde Groussard, assistante hospitalo-universitaire et neuropsychologue au CHU de Caen.

Le Monde, mercredi 26 février 2014. Groussard M et al. When Music and Long-Term Memory Interact: Effects of Musical Expertise on Functional and Structural Plasticity in the Hippocampus. PLosONE 2010; 5(10). pii: e13225. 5 octobre 2010. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2950159/ (texte intégral).