Les personnes malades photographient leur environnement (3)

Interventions non médicamenteuses

Date de rédaction :
01 juillet 2014

Pascale Lord, photographe et art-thérapeute diplômée, est directrice d’une plateforme d’accompagnement et de répit au Valadou (Aveyron). Elle propose différentes activités, allant « dans le sens de l’apaisement ou de la simulation, en fonction du contexte et de l’état du participant : il peut s’agir de développer la prise d’initiative, d’enrichir les moyens d’expression, de consolider la confiance et l’affirmation de soi, de structurer les facultés relationnelles et le maintien des savoir-faire. La photographie stimule la capacité de reconnaître les visages, de saisir les ressemblances ou les différences, de percevoir l’espace et le temps. La photographie est un langage qui permet aux personnes souffrant de troubles cognitifs sévères de s’exprimer. » À chaque visite hebdomadaire à la plateforme, les participants regardent attentivement les images affichées au mur. « Ce moment est devenu incontournable, et il semble important pour eux de se voir et d’être “à la une” en quelque sorte. Le numérique constitue un progrès appréciable pour visualiser les photos immédiatement, au cours de la même séance, particulièrement auprès de personnes atteintes de troubles de la mémoire. Cette visualisation immédiate des clichés sur l’appareil ou sur l’ordinateur est source de joie et de partage. Cela permet aux participants de s’inscrire dans le présent, de relier immédiatement le geste à l’objet et au résultat. L’impression des photos sur un support papier permet ensuite leur manipulation ; elle offre un contact plus charnel avec les images. Celles-ci circulent, s’échangent, s’offrent, s’affichent aux murs du centre. » Pour Pascale Lord, le déclencheur est un mot clé dans l’accompagnement : « déclencher, c’est activer un mécanisme, démarrer une action. Pour les participants, faire et expérimenter la nouveauté, alors que les capacités d’encodage et de stockage de l’information sont altérées, relève d’un défi. Et pourtant, il y a bien déclenchement. De manière inopinée, les choses arrivent, la magie opère. Elle est de courte durée, mais significative. Un acte est posé, une image est créée, un partage est possible. » « C’est moi sur ces photos ? Ah, je suis content, car je ne savais pas comment les autres me voyaient », dit un participant. Dans ces photos, il n’y a plus de “malades atteints d’Alzheimer”, mais des personnes à part entière, qui dévoilent toute leur singularité, leur humanité, leur beauté. Celles-ci retrouvent donc visage humain, photographié et “photographiable”, au sein d’une même communauté d’hommes et de femmes et non plus de malades dits “déments”. »

France Alzheimer. Tant de choses à dire. Ateliers artistiques pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Paris : Le Cherche-Midi. ISBN 978-2-7491-3602-8.

www.francealzheimer.org/sites/default/files/Tant%20de%20choses%20%C3%A0%20dire_bon%20de%20souscription.pdf. Septembre 2014.