Perte de l’audition et cognition : l’aidant du presbyacousique
Interventions non médicamenteuses
« La pratique sur le terrain m’a vite fait comprendre que, comme les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et les aveugles, le presbyacousique avait besoin d’un aidant », observe Séverine Leusie. « Cet “aidant du presbyacousique” a pris une telle place dans la qualité du résultat, l’économie de séances orthophoniques, le confort du malentendant, que nous avons prévu au GRAPsanté de créer des associations de bénévoles si on ne trouve pas cet aidant à proximité. L’aidant est l’enjeu de la réussite. Grâce à notre premier recueil de données, nous avons constaté que près de 80% des personnes vivant en établissement d’hébergement (âgées en moyenne de quatre-vingt-cinq ans) avaient une surdité supérieure à 30 décibels (dB) de perte moyenne bilatérale et près de 95% une surdité supérieure à 15 dB de perte [une perte de 30 dB rend quasiment impossible la compréhension d’une discussion à voix basse]. Ce travail en EHPAD nous a fait prendre conscience que se préoccuper de l’audition des patients à cet âge était bien trop tardif. Ce n’est pas tout : pour ceux qui avaient été appareillés, les scores cognitifs étaient meilleurs que ceux qui n’étaient pas appareillés. À notre avis, c’est dix, voire vingt ans plus tôt qu’il faudrait intervenir, lorsque les déficits auditifs sont encore minimes. Attendre une perte auditive plus importante me donne le sentiment qu’on “rate le coche”, et qu’on commence à faire travailler le cerveau quand il est déjà très abîmé. En attendant, avons-nous besoin que la science découvre un lien de cause à effet qui explique la corrélation entre audition et cognition pour d’ores et déjà traiter les presbyacousiques ? Au mieux, le traitement complet de la presbyacousie pourrait diminuer le nombre de personnes atteintes de démence et au pire, ces personnes auront gardé le bonheur d’entendre jusqu’à la fin de leur vie. »
La Lettre du GRAPsanté, juillet 2014.