« Dire que l’on a la maladie d’Alzheimer n’est pas honteux. En parler, c’est accepter et avancer »
Société inclusive
Il y a cinq ans, les médecins de l’hôpital de La Timone ont suggéré à Sylvie Chaspoul de reprendre une activité professionnelle. « Cela fait partie de mon programme de suivi. » Elle n’hésite pas une minute. La société DMP, basée à Valensole et spécialisée dans la cosmétique et la savonnerie, l’accueille à mi-temps. « Quand je suis dans le magasin, je suis heureuse. Je fais des corbeilles de produits, je confectionne des sachets de lavande, mais par-dessus tout, j’aime faire les paquets cadeaux. Je vis pleinement mon métier et je trouve cela merveilleux. » Le reste du temps, elle sort très peu. « Je tourne en rond. J’ai du mal à me concentrer. Lire devient difficile. Je comprends l’intrigue mais une fois le livre refermé, j’ai tout oublié. C’est pareil avec la télévision. Je suis un film et hop, à la fin, plus rien. J’ai du mal avec les mots croisés. Mon écriture a changé. Les mots se mélangent sur la feuille. En revanche, je joue très bien aux cartes. » Sylvie a ses petites manies. « Je prends toujours le même chemin pour ne pas me perdre car c’est arrivé une fois. » Elle parle haut et fort quand elle place ou déplace un objet. Elle se rend à ses séances d’orthophonie. « Je ne sais pas si c’est utile », dit-elle. Elle travaille l’argile : « ça me calme. » Elle sait que son traitement a apparemment stabilisé la maladie. Même si certains gestes ne trompent pas. « Je déplace les meubles. Sans m’en rendre compte, je mets une grosse pagaille dans la maison. » Lucide, elle dit éviter de trop songer à son avenir. Elle ne s’interdit pas d’intégrer une association pour soutenir tant qu’elle peut ceux qui sont comme elle. « Dire que l’on a la maladie d’Alzheimer n’est pas honteux. En parler, c’est accepter et avancer. Si mon témoignage peut aider les autres, j’en suis comblée. »