Protection judiciaire des majeurs et éthique : les limites du système

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Date de rédaction :
12 mai 2016

« Le besoin d’éthique dans le champ des majeurs protégés ne date pas d’hier. Mais il prend une acuité particulière depuis que la loi de 2007 a ajouté un volet personnel de protection des personnes au mandat de gestion financière et patrimoniale », explique-t-elle : pour tenir compte des enjeux de la réforme en termes d’accompagnement bientraitant, le premier souci a été de professionnaliser les mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Le rapport recommande de renforcer à la fois leur formation initiale (« la complexité de la profession justifierait la délivrance d’un diplôme équivalant à un master 1 et non plus d’un simple certificat de compétence »), et de prévoir une formation continue obligatoire d’au moins une semaine par an. Face aux questions éthiques auxquelles se confrontent les différents professionnels intervenant dans le champ de la protection des majeurs, Anne Caron-Déglise estime « nécessaire de mettre en place, dans chaque région, une instance éthique transdisciplinaire », financée par les pouvoirs publics, sur le modèle de celle qui existe dans les Hauts-de-France. On compte seulement quatre-vingts juges des tutelles en équivalent temps plein en France, et aussi peu de greffiers en chef qui contrôlent les comptes. « Nous sommes donc en très grande difficulté pour vérifier l’effectivité du droit des personnes », commente la magistrate, avec le risque de fermer les yeux sur certains dysfonctionnements et/ou de mettre les professionnels dans une impasse. Ainsi, devant les problèmes que pose une famille malveillante avec un majeur protégé, les services sociaux, puis le médecin, puis le mandataire judiciaire se disent qu’il n’y a pas d’autre solution pour assurer la sécurité de l’intéressé que de l’orienter en établissement – ce que lui-même ne souhaite pas. « Nous sommes alors dans un vrai questionnement sur la bientraitance et la maltraitance », analyse Anne Caron-Déglise. Mais, « pour avancer sur l’éthique, et le faire de manière organisée, il est indispensable qu’il y ait une volonté politique forte. Sinon, chacun va s’approprier la réflexion au niveau de chaque corps de métier. Partir dans tous les sens ne me paraît pas être la meilleure façon de respecter les personnes ».

Actualités sociales hebdomadaires, 27 mai 2016.