Approches culturelles et perceptions des troubles de la mémoire
Acteurs de l'écosystème Alzheimer
Une étude menée par le Dr Sahdia Parveen, de l’Université de Bradford et l’association Age UK, auprès de cent soixante-quinze personnes originaires d’Inde, d’Afrique, des Caraïbes et d’Europe de l’Est, vues dans des réunions de sensibilisation à la maladie d’Alzheimer, montre qu’il existe de nombreuses fausses croyances quant aux causes de la maladie. Les différents groupes peuvent faire appel à la religion pour contrôler la maladie au niveau individuel, au lieu de recourir à des soins médicaux. Les obstacles principaux pour le recours aux services de soins et d’accompagnement sont la méconnaissance de ces services ainsi que des obstacles culturels spécifiques, dont la barrière de la langue.
L’équipe du Pr Gill Livingston, de la division de psychiatrie de l’Université College de Londres s’est intéressée aux obstacles que peuvent rencontrer les personnes des communautés noires africaines et des Caraïbes britanniques dans leur recours aux services spécialisés lorsqu’elles ont des troubles de la mémoire. Les chercheurs ont mené une étude qualitative auprès d’un échantillon diversifié de cinquante personnes, âgées de dix-huit à quatre-vingt-cinq ans, qui se définissent elles-mêmes comme Noirs africains, Noirs antillais, Noirs britanniques et Indo-Caraïbes, de religion et de statut socio-économique divers. 92% avaient un médecin généraliste référent. Que pensent ces personnes de la démence et que doit faire leur famille si elle est confrontée à la maladie ? De nombreuses personnes reconnaissent que l’on peut avoir des troubles de la mémoire, mais que ceux-ci n’indiquent pas qu’il y a une démence, ou encore que le concept de démence ne s’applique pas à elles « we don’t do dementia » (nous ne faisons pas de démence). La démence est vue comme une maladie des Blancs. Les participants ne voient pas grand intérêt à consulter un médecin généraliste pour des troubles de la mémoire. Beaucoup pensent qu’on ne va le voir que pour des problèmes graves. Certains expliquent que leur culture valorise le secret dans les affaires personnelles, et ne veulent pas discuter d’un problème privé avec un médecin. Les participants n’apprécient pas qu’un généraliste puisse les adresser à un centre mémoire spécialisé, ayant plus de temps et d’expertise. Ils sont inquiets des effets indésirables des médicaments et de l’entrée forcée en établissement. « Les soins sont une affaire de famille. » « Au pays d’où je viens, il n’y a pas de définition de la démence. Une vieille personne, ça oublie. C’est quand on devient vieux. » Pour les chercheurs, toute intervention devrait légitimer l’accès précoce à un médecin, mettre en avant la nature physique de la maladie, qui arrive aussi dans la communauté noire, et expliquer que de l’aide et des soins sont disponibles dans les centres mémoire, dont le rôle est de prolonger la vie autonome à domicile et de soutenir les aidants dans l’accompagnement.
Parveen S et al. Perceptions of dementia and use of services in minority ethnic communities: a scoping exercise. Health Soc Care Community, 9 juin 2016.
www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27278859.
Berward S et al. Black African and Caribbean British Communities’ Perceptions of Memory Problems: “We Don’t Do Dementia.” PLOS One, 5 avril 2016. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4821595/pdf/pone.0151878.pdf(texte intégral).