Dépendance : quel financement ?

Droit des personnes malades

Politiques

Date de rédaction :
03 septembre 2020

Le président de la République avait évoqué oralement, au Congrès 2018 de la Mutualité française, un besoin de financement de l’ordre de 9 à 10 milliards d’euros supplémentaires. Comment assurer un financement pérenne ? Jérôme Guedj, coauteur du rapport du think tank Matières grises « Les personnes âgées en 2030 » et ancien président du conseil général de l’Essonne, rappelle que la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale, créée par le gouvernement Juppé en 1996, pour une durée initiale de 13 ans, s’applique au taux de 0,5 % à tous les revenus (du travail, de remplacement et du capital). Elle finance la CADES, caisse d’amortissement de la dette sociale. Il a fallu adjoindre à la CRDS une fraction de la contribution sociale généralisée (0,4 %) pour éponger cette dette sociale, ce qui est bientôt chose faite. En 2024, la CADES n’aura plus de raison d’être. Ces contributions sociales rapportent 14 milliards par an. Jérôme Guedj estime que le maintien de la CADES constituerait une chance unique de financer ce nouveau risque dans un consensus politique. Le financement de la dépendance est presque intégralement couvert par trois acteurs : l’assurance maladie, l’Etat et les ménages. Quel peut être le rôle de l’assurance privée, encore très marginal ? On estime que 6,8 millions de personnes en France disposent d’une garantie dépendance, mais avec une couverture limitée, annuelle, de l’ordre de 150 euros par mois. La majorité des contrats sont mutualisés et sont commercialisés par les mutuelles ou via les entreprises. Il existe aussi des contrats viagers individuels, peu nombreux, vendus surtout en bancassurance, et des contrats viagers collectifs, distribués via les entreprises. Le nombre de bénéficiaires est encore très faible par rapport au nombre de personnes couvertes : en effet, la dépendance survient en moyenne vers 85 ans, soit une trentaine d’années après leur souscription. Pour l’économiste Roméo Fontaine, chargé de recherche à l’INED (Institut national d’études démographiques), auteur d’une récente étude sur le sujet pour le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), beaucoup voient dans l’assurance dépendance un risque de cotiser à fonds perdus et préfèrent se tourner vers l’épargne. Celle-ci implique cependant d’immobiliser un montant considérable pour couvrir le risque d’entrée en dépendance et surtout sa durée, qui augmente, ce qui rend l’épargne de moins en moins attractive. Pour Thomas Béhar, directeur de la performance financière du groupe CNP Assurances et président de l’Association actuarielle européenne, doute que dans les limites budgétaires actuelles, l’État ait à lui seul les moyens de financer le reste à charge en matière de dépendance. Selon lui, l’assurance privée aura un rôle important à jouer dans le cinquième risque de la sécurité sociale, en complétant par exemple une assurance dépendance publique obligatoire.

Mutations, octobre 2018. Le Mensuel des maisons de retraite, octobre 2018. Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. La prise en charge des aides à l’autonomie et son incidence sur la qualité de vie des personnes âgées et de leurs proches aidants. Synthèse du rapport, 1er décembre 2017. www.hcfea.fr/IMG/pdf/2017_12_01_Synthese_Rapport_Age-2.pdf.