Échecs thérapeutiques : la prise de risque des laboratoires

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Date de rédaction :
29 avril 2020

Le laboratoire pharmaceutique danois Lundbeck a annoncé les résultats négatifs de trois essais cliniques de phase 3 (à grande échelle chez l’homme), testant l’efficacité de l’idalopirdine (un inhibiteur de la neurotransmission) en association avec les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, pendant 24 semaines. Le traitement n’a pas plus d’effet sur la cognition que le placebo. Les essais ont été menés dans 34 pays, auprès de 2 525 personnes âgées de 50 ans et plus, atteintes d’une forme légère à modérée de la maladie d’Alzheimer. « La maladie d’Alzheimer semble décidément rétive à toutes les molécules actuellement testées », écrit Catherine Ducruet, des Echos. « Une mauvaise nouvelle de plus dans un domaine sur lequel les laboratoires pharmaceutiques s’acharnent en vain depuis déjà une vingtaine d’années, motivés par la promesse d’un marché potentiel de quelque 24 millions de personnes. Un chiffre qui devrait doubler d’ici à 2030 et tripler d’ici à 2050. » Lilly, qui a lui aussi subi plusieurs lourds revers, notamment dans la maladie d’Alzheimer, a pour sa part annoncé 3 500 suppressions de postes en septembre 2017 mais a choisi de conserver son pipeline de projets, pour maintenir l’expertise interne.  Biogen a décidé en août dernier d’étendre son étude de Phase Ib [essais chez un petit nombre de volontaires sains pour tester la toxicité et la dose maximale tolérée chez l’homme, ainsi que le devenir du médicament dans l’organisme] avec l’aducanumab, une molécule qui cible la plaque amyloïde. Le laboratoire a choisi la prise de risque maximum dans le domaine de la maladie d’Alzheimer pour sortir de son fief de la sclérose en plaques où elle est de plus en plus concurrencée. Sans préjuger des résultats attendus sur les molécules en cours de développement, il apparaît qu’une meilleure compréhension de la maladie et de ses mécanismes sera un préalable à une percée réelle dans les traitements. C’est la stratégie du français Sanofi qui a recruté en mars 2017 Angel Cedazo-Minguez, professeur de neurogériatrie moléculaire à l’Institut Karolinska de Stockholm (Suède) comme directeur de la recherche préclinique. La maladie d’Alzheimer est un concept trop hétérogène pour identifier des cibles moléculaires. Il faut parler d’un syndrome (ensemble de signes) plutôt que d’une maladie. La recherche sur le syndrome Alzheimer est maintenant ciblée sur les mécanismes des facteurs de risque.

https://www.theguardian.com/society/2018/jan/09/alzheimers-setback-as-promising-drug-shows-no-benefit-in-clinical-trials-idalopirdine, 9 janvier 2018. www.lesechos.fr/industrieservices/pharmacie-sante/0301129068396-alzheimer-les-laboratoires-tentent-de-limiterleur-risque-2143832.php#pWzp4RZP5g3rwsa0.99, 10 janvier 2018.  https://issuu.com/karolinska_institutet/docs/cell_to_society_2017, 12 octobre 2017.  Medina M et al. Toward common mechanisms for risk factors in Alzheimer’s syndrome. Alzheimers Dement 2017; 3(4): 571-578. 19 novembre 2017. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5671628/pdf/main.pdf (texte intégral).