L’effet « Coupe du Monde »
Recherche
« Qu’on adore ou qu’on déteste le foot, qu’on le suive régulièrement ou une fois tous les quatre ans, qu’on soit né un soir de juillet 1998 ou trente ans avant, nous avons tous une expérience singulière et collective liée à la Coupe du monde », écrit Julien Laloye, de 20 minutes, qui évoque la capacité qu’ont les passionnés de football de calquer leurs souvenirs en fonction d’un match, d’une victoire, d’une émotion. Il rappelle une expérience menée en 2015 en partenariat avec la Fondation Santé et vieillissement de l’Université autonome de Barcelone et la revue sportive espagnole Líbero. Diego Barcelo, rédacteur de la revue, a créé des numéros d’époques spéciaux pour chaque décennie, avec Pelé ou Cruyff en couverture, et même embauché un commentateur radio pour faire revivre les grands matchs des années 1950 jusqu’aux années 1970 dans les conditions du direct. Il se souvient des dizaines de mails reçus par des familles touchées par la maladie : « J’ai encore en mémoire le mail le plus émouvant que j’ai reçu. C’était une jeune fille, je crois. Elle m’a dit : “Ma grand-mère ne me reconnaît plus mais quand je commence à lui chanter l’hymne de l’Atletico Madrid, elle finit les paroles avec moi”. Un autre m’avait dit que son père ne savait plus son nom mais qu’il était capable de réciter par cœur une composition du Real des années 50. Les patients n’en sont pas tous au même stade mais les médecins ont été unanimes : les revues ont été très bénéfiques notamment pour les familles. Elles retrouvent un sujet sur lequel échanger avec la personne atteinte, un sujet qui évoque des bons souvenirs, qui plus est ». Pour poursuivre l’expérience, Líbero a créé le site Fútbol vs Alzheimer: il permet non seulement aux lecteurs de faire des dons de revues à des centres de soins mais aussi d’élaborer eux-mêmes des contenus pour tablettes adaptés à une personne en particulier. La maladie d’Alzheimer n’altère pas les capacités émotionnelles. Le sport peut contribuer à une sorte de mieux-être. « Les souvenirs sportifs, c’est un peu la madeleine de Proust chez les gens qui aiment ça », déclare la psychologue Judith Mollard-Palacios (France Alzheimer). La France privilégie les arts comme la musique ou la peinture ; et pourquoi pas le foot ?, se désole Julien Laloye. Au Royaume-Uni, la thérapie de réminiscence par le football, chez des hommes atteints de la maladie d’Alzheimer, fait l’objet de travaux de recherche depuis plusieurs années (Solari CA et Solomons L, 2012).
www.20minutes.fr/sport/football/2294683-20180623-coupe-monde-vies-episode-16-reactiver-memoire-stimulant-passion-comment-foot-permet-aider-malades-alzheimer. www.cahiersdufootball.net/article-le-football-contre-alzheimer-5925, 30 juin 2015. Solari CA et Solomons L. The World Cup effect: Using football to engage men with dementia. Dementia 2012 ; 11(5) : 699–702. 1er septembre 2012.
http://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/1471301211429177 (texte intégral).