Des tests sanguins pour le diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer : où en est-on ?
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Diagnostic et détection
Bruno Vellas, coordinateur du gérontopôle de Toulouse, évoque le clivage entre les avancées de la recherche sur la maladie d’Alzheimer et les soins primaires. Selon lui, l’apparition prochaine des biomarqueurs plasmatiques à la disposition du médecin généraliste va changer la donne. En effet, le généraliste pourrait voir, par une simple prise de sang, si le patient produit le peptide amyloïde en lien avec la maladie d’Alzheimer. Cela devrait aider le médecin à cibler les sujets à risque et à déterminer si un trouble de la mémoire est en rapport avec une forte probabilité de survenue d’une maladie d’Alzheimer. La mise au point de tests sanguins pour la détection précoce de la maladie d’Alzheimer en population générale représente un enjeu majeur : ils permettraient de sélectionner uniquement les personnes à risque devant passer des examens d’imagerie et pouvant entrer dans des protocoles de recherche, soulignent Harald Hampel, de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Chaire AXA-Université Paris-Sorbonne) et ses collègues : il s’agit « d’exclure des protocoles d’imagerie le grand nombre de personnes atteintes de déficits cognitifs ne présentant pas la preuve d’une pathophysiologie Alzheimer sous-jacente. » Pour accélérer la validation de biomarqueurs sanguins fiables, une collaboration internationale est indispensable. Steven Kiddle et ses collègues, de l’Institut de psychiatrie, psychologie et neuroscience du King’s College de Londres et de l’Institut de santé publique de Cambridge (Royaume-Uni), rappellent que plusieurs dizaines de protéines, de gènes, de métabolites issus du plasma sanguin ont été testés, mais ne peuvent pas être considérés comme des biomarqueurs fiables du risque de survenue d’une maladie d’Alzheimer : leur spécificité [probabilité que le test soit positif lorsque le patient est réellement malade, avec 0 % de faux positifs pour une sensibilité de 100 % ] et leur sensibilité [probabilité que le test soit négatif lorsque le patient n’est pas malade, avec 0 % de faux négatifs pour une sensibilité de 100 %] sont encore trop faibles. Les résultats ne sont pas réplicables d’un laboratoire à l’autre, soulignent Yu Shi, du département de psychiatrie de l’Université d’Oxford. En attendant leur utilisation en pratique médicale courante, les chercheurs espèrent que l’utilisation des tests sanguins leur permettra de sélectionner les patients au niveau prodromal (symptômes annonciateurs, avant-coureurs, d’un état pathologique), dans les essais pré-cliniques (en l’absence de tout signe) ou cliniques (en présence de signes manifestes de la maladie), en ciblant uniquement les sujets à risque.
Doc’Alzheimer. Octobre-décembre 2018. Hampel H et al. Blood-based biomarkers for Alzheimer disease: mapping the road to the clinic. Nat Rev Neurol 2018; 14(11): 639-652. Novembre 2018. www.pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30297701/. Kiddle SJ et al. A Blood Test for Alzheimer’s Disease: Progress, Challenges, and Recommendations. J Alzheimers Dis 2018; 64(s1): S289-S297. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6010156/pdf/emss-75806.pdf (texte intégral). Shi L et al. A Decade of Blood Biomarkers for Alzheimer’s Disease Research: An Evolving Field, Improving Study Designs, and the Challenge of Replication. J Alzheimers Dis 2018; 62(3): 1181-1198. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5870012/pdf/jad-62-jad170531.pdf (texte intégral).