Aducanumab : les avis des experts divergent
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Médicament contre Alzheimer : des espoirs et des questions, titre Elena Sanders, de Sciences et Avenir. C’est probablement une date historique, s’enthousiasme le Pr Bruno Dubois, directeur de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer (IM2A) à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris. Il déplore que l’étude de futilité ait privé les deux essais de leur développement complet et donc d’une partie des résultats. C’est une faute que le laboratoire paie très cher car, à présent, son résultat n’est pas aussi puissant qu’il n’aurait pu l’être. » Pour le Pr Audrey Gabelle, neurologue, qui dirige le centre mémoire de ressources et de recherche (CMRR) au CHU de Montpellier, « certes, les patients ne récupèrent pas leur état cognitif antérieur, mais ils se stabilisent. C’est un bénéfice d’autant plus important qu’à ce stade, les atteintes cognitives ne sont pas encore très marquées. »
Zaven Khachaturian, rédacteur en chef d’Alzheimer’s & Dementia, la revue scientifique de l’Association Alzheimer américaine, déclare : « Je ne sais si c’est une explication complète. La réponse finale viendra quand des études avec des doses plus élevées pendant des périodes plus longues reproduiront ces résultats. » Le médicament pourrait-il être mis sur le marché ? « Aducanumab peut avoir toutes sortes de défauts, mais il faut lui donner une chance avec l’espoir que d’autres viendront améliorer ce composé, cette stratégie. Parce que maintenant nous avons un moyen d’influer sur l’évolution de la maladie. »
Robert Howard, psychiatre à l’University College de Londres, qui a mené des essais cliniques sur des traitements potentiels contre la maladie d’Alzheimer, n’est pas d’accord : « Je ne pense certainement pas qu’il faille autoriser ce médicament sur la base de ces données : les résultats plus positifs d’un sous-groupe de patients qui n’ont pas été présélectionnés lors du lancement de l’essai ne sont pas convaincants. Biogen a vraiment enfreint toutes les règles, sur la façon d’analyser les données et de les rapporter. » Robert Howard considère les résultats positifs d’EMERGE comme potentiellement fallacieux, étant donné les échecs des essais des molécules anti-amyloïdes qui l’ont précédé. Après avoir publié un point de vue sceptique sur les résultats préliminaires de l’essai dans Nature Reviews Neurology, il a entendu deux familles de participants aux essais de Biogen, qui étaient inquiets qu’on leur ait retiré le médicament lorsque l’essai s’est arrêté, pour apprendre ensuite qu’il pouvait avoir des avantages après tout. « Que vous ayez reçu le médicament et non le placebo, les avantages étaient probablement si minimes qu’ils ne seraient peut-être pas évidents pour un patient en particulier. Essayez de ne pas trop regretter ou de vous inquiéter pour cela. »
www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/alzheimer-l-aducanumab-confirme-ses-bons-resultats_139586, 6 décembre 2019. www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/alzheimer-bruno-dubois-evoque-les-perspectives-d-un-medicament_139662, 10 décembre 2019. www.lepoint.fr/editos-du-point/anne-jeanblanc/traitement-d-alzheimer-cette-fois-l-espoir-est-bien-reel-09-12-2019-2352145_57.php, 9 décembre 2019.
www.sciencemag.org/news/2019/12/skepticism-persists-about-revived-alzheimer-s-drug-after-conference-presentation, https://apnews.com/463d7c8817704c73b0960d6745b75dfe, 5 décembre 2019.