Déménagement et maladie d’Alzheimer : l’aidant comme tuteur de résilience

Acteurs de l'écosystème Alzheimer

Les aidants / les familles

Date de rédaction :
22 juillet 2020

Les professionnels conseillent souvent aux personnes âgées de vivre en ville ou en centre-village pour compenser la diminution de leur mobilité, notamment lorsqu’elles sont atteintes de maladies neuro-évolutives, écrit Émilie Arpino-Gay, du service de médecine gériatrique du centre hospitalier Pierre-Oudot à Bourgoin-Jallieu (Rhône). Un domicile moins grand est à l’échelle du couple réduit dans ses déplacements. Le déménagement entraîne une perte du chez-soi : la personne passe d’un lieu sûr à un lieu non sûr. La perte de son logement, de son habitat, construit et façonné au fil des décennies avec son conjoint et ses enfants, conduit à la perte de son histoire. Le déménagement remet en cause l’immuabilité du soi. Il désorganise, il change les repères spatiaux par l’agencement des pièces, la place des objets. L’espace vient au secours du temps : tel objet, je l’ai acheté à tel endroit, donc c’était à tel moment. Se séparer de certains objets limite ce repère temporel. La personne peut subir un traumatisme d’arrachement, dans la violence de la séparation avant son chez-soi. Le travail de deuil est plus difficile chez une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. Plus la personne a été actrice de son déménagement, meilleurs sont l’acceptation et l’investissement dans le nouveau logement comme un chez-soi. L’aidant doit investir ce nouveau logement pour deux : s’il s’y sent lui-même heureux, il transmettra son approche positive à son conjoint. Il sera alors un « tuteur de résilience » face aux traumatismes de la maladie et du déménagement. Il pourra choisir la décoration, les meubles qui permettront la continuité de l’histoire de la personne malade et faciliter l’appropriation du lieu. La présence de l’aidant lui-même constitue un des seuls repères pour une personne à un stade avancé de la maladie. Un comportement bienveillant augmentera le sentiment de sécurité de la personne malade, qui pourra peu à peu associer ce nouveau lieu à des émotions positives : la mémoire émotionnelle est en effet longtemps préservée dans la maladie d’Alzheimer.

Arpino-Gay E. Déménagement et maladie d’Alzheimer. Neurol Psychiatr Gériatr 2019 ; 19 : 110-113. www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1627483018301843.