Temps des chercheurs, temps des politiques, temps des soignants, temps des malades

Édito

Date de rédaction :
01 juin 2007

Les politiques sont pressés. Les chercheurs voudraient bien gagner leur course contre la montre. Les soignants savent bien qu’il faut, suivant une formule célèbre, laisser du temps au temps. Les personnes malades, elles, ont leur propre temps qui n’est, peut-être, ni celui des politiques, ni celui des chercheurs, ni même celui des soignants.

Détection précoce : voilà, semble-t-il, les mots clés de ce mois de juin, qui a vu, tout à la fois, une nouvelle équipe s’installer au pouvoir en France, avec de grands projets face à la maladie d’Alzheimer, et des centaines de spécialistes venus du monde entier se réunir à Washington pour une deuxième conférence internationale consacrée à la « Prevention of dementia » (nous ne traduisons pas dementia, qui n’a pas en anglais les mêmes connotations que démence).

Nicolas Sarkozy l’avait promis dans sa campagne : un nouveau plan Alzheimer sera bientôt lancé. Ce sera même l’un des trois grands « chantiers présidentiels » (nouvelobs.com, 20 juin). Les réunions de mise au point se succèdent à l’Elysée (Espace social européen, 22 au 28 juin). Le professeur Arnold Munnich, conseiller du chef de l’Etat pour la recherche biomédicale et la santé, laisse prévoir qu’il s’agira, avant tout, de créer de « grandes plates-formes de recherche » et de faire « un effort particulier sur l’imagerie médicale » (La Croix, 12-13 juin). Philippe Douste-Blazy sera chargé de « conduire une réflexion » à ce sujet auprès du chef de l’Etat (Le Monde, 23 juin). Xavier Bertrand, ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité, annonce, lui, une concertation sur la naissance d’une « cinquième branche » de la Sécurité sociale, destinée à couvrir le risque de dépendance (www.agevillagepro.com, 18 juin).

Les associations approuvent, bien sûr, l’effort budgétaire annoncé. Mais beaucoup insistent cependant sur la priorité d’une aide aux aidants, avec la définition d’un véritable statut des aidants et le développement de « vrais accueils thérapeutiques de jour » (La Croix, 12-13 juin).

Pendant ce temps, les scientifiques mettent les bouchées doubles pour tenter de mettre au point des techniques fiables de diagnostic précoce : Pet Scan (La Lettre de Décideurs en gérontologie, 12 juin), test sanguin (www.boursorama.com, 7 juin), nouveau système d’imagerie médicale (www.capgeris.com, 31 mai ; www.medicalnewstoday.com, 17 juin ; www.prnewswire.com, 12 juin) ; DSM48 (La Lettre mensuelle de l’Année gérontologique, juin-juillet), test clinique prédictif (www.alz.org, 10 juin ; www.news-medical.net, 17 juin).
Mais cet effort très significatif pour améliorer la fiabilité du diagnostic précoce se heurte toujours au même obstacle : une fois le mal diagnostiqué bien avant les premiers symptômes, comment retarder la survenue de la maladie ? Le point sur les essais cliniques se révèle, pour l’instant, décevant (www.medicalnewstoday.com, 12 juin ; www.alz.org/preventionconference/pc2007, 11 juin ; www.alz.org, 9 et 10 juin).

Peut-être, au fond, faut-il en attendant se retourner vers les chercheurs en sciences sociales qui s’efforcent de comprendre les émotions et les réactions des personnes atteintes de la maladie et d’améliorer leurs conditions de vie (ainsi que celles de leurs proches) : prendre conscience que le malade éprouve aussi plaisir et douleur (NeurologiePsychiatrieGériatrie, juin), que ses troubles du comportement sont une forme de langage (Soins Gérontologie, mai-juin), qu’il importe, bien souvent, de retrouver « le temps des malades », rarement synchrone avec « le temps des soignants ».

Jacques Frémontier
Journaliste bénévole