Récupération espacée

Interventions non médicamenteuses

Date de rédaction :
10 juin 2011

Pour Jérôme Erkes, psychologue et neuropsychologue à Montpellier, « face aux troubles de la mémoire, l’attitude qui prévaut généralement est une forme de fatalisme, basée sur l’idée qu’il n’est pas possible de les prendre en charge. Cette attitude a été appelée nihilisme thérapeutique par le Pr Cameron Camp, en ce qu’elle conduit à exclure toute possibilité d’utilisation des ressources et capacités restantes de la personne en vue d’une amélioration, l’enfermant ainsi dans une vision négative, centrée sur les pertes. Pourtant, des solutions existent. Il est en effet largement démontré que les personnes atteintes de troubles sévères de la mémoire gardent certaines capacités mnésiques, regroupées sous le terme de mémoire implicite ». La « récupération espacée » (spaced retrieval) est une prise en charge des troubles de la mémoire, initialement développée pour les personnes atteintes de traumatismes crâniens et des démences (Camp et al, 1966). Elle vise à permettre la mémorisation d’informations ou de savoir-faire via des rappels successifs de l’information dans des délais de plus en plus longs. Une fois mémorisée de cette façon, l’information devient alors plus résistante à l’oubli. Mme A, âgée de quatre-vingt-onze ans, ne s’alimente plus et reste immobile devant son assiette. Il ne s’agit pas d’un problème médical aigu, ni de troubles de déglutition. Le manque de personnel ne permet pas qu’un soignant s’occupe d’elle durant tout le repas. Faut-il pour autant envisager une gastrotomie d’alimentation ? Avant d’en arriver à cette solution, une prise en charge par récupération espacée a été initiée. Dans un premier temps, les soignants constatent que Mme A était capable de s’alimenter lorsqu’on l’y incitait en lui proposant de prendre ses couverts et de manger : « Madame A, que faites-vous lorsque vous êtes à table devant votre assiette » ? « Je prends mes couverts et je mange ». Dès lors, la prise en charge a consisté à lui réapprendre à initier d’elle-même ce comportement. En une semaine, Mme A a repris son alimentation, en s’arrêtant de temps en temps. Il suffit alors au soignant présent de lui reposer la même question pour qu’elle continue son repas tranquillement. 

Erkes J. La récupération espacée. Un outil simple pour faire face aux troubles de la mémoire. Doc’Alzheimer 2011 ; 3 : 31-33. Avril-juin 2011. Camp C et al. Memory interventions for people with dementia. Appl Cogn Psychol 1996; 10: 193-2010.